Avez-vous vu passer sur Facebook la semaine dernière la capsule vidéo du journaliste automobile Antoine Joubert sur la dépréciation des véhicules électriques ? Ce dernier a expliqué à l’animateur Daniel Melançon qu’acheter une voiture électrique en 2021 demeure un pari risqué à cause de la valeur de revente. L’exemple le plus criant : le prix de la Bolt 2022 qui baisse de presque 7 000 $ et qui fait baisser le prix de toutes les Bolt d’occasion.
Dans sa façon d’expliquer les choses, j’ai eu l’impression qu’Antoine Joubert n’est pas très friand de voitures électriques. Est-ce que je me trompe ? Je ne connais pas ce chroniqueur automobile, mais normalement il aurait dû se réjouir de voir qu’un constructeur baisse enfin le prix de ses VÉ. C’est ce que tout le monde souhaite, non ? Les prix baissent et voilà qu’Antoine nous dit que c’est une mauvaise nouvelle pour les consommateurs, car tous ceux qui ont acheté des Bolt voient la valeur de leur véhicule baisser.
Pour justifier ses dires, Antoine Joubert explique que la dépréciation d’une Bolt de trois ans aux États-Unis est de 60% et parfois même plus. J’imagine qu’il a lu ça dans la presse américaine et je le crois sur parole. Par contre, il faut replacer ça dans le contexte et ne pas se servir de cette statistique pour faire peur à tous les futurs acheteurs de véhicules électriques.
Il faut savoir par exemple que la plupart des véhicules à essence perdent 50% de leur valeur en trois ans. Ce n’est pas nouveau, c’est un fait ! (Lisez cet article de La Presse à le sujet.) Il faut savoir aussi que les subventions, ça joue sur la dépréciation. Le fait que les gens paient leur voiture moins cher que le prix réel fait baisser la valeur de revente.
Et ce n’est pas tout. Il faut comprendre aussi que la cote de popularité des VÉ est spécifique à chaque pays et varie selon les goûts des consommateurs. Chez nous, au Québec, la Bolt est très populaire, mais il en va autrement aux États-Unis. Là-bas, dans l’électrique, il n’y a que Tesla qui est populaire. Les autres marques vendent leurs VÉ au compte-goutte. Les Américains sont très en retard dans ce domaine.
En plus, la Bolt est une petite voiture hatchback et les Américains n’aiment pas les petites voitures hatchback. D’ailleurs, je n’ai jamais compris pourquoi GM n’a pas sorti dès le début un VÉ comme la Bolt EUV qui sortira cet été. Ce dernier ressemble davantage à un VUS et c’est ce que les Américains aiment !
Bref, dans la tête de bien des Américains, la Chevrolet Bolt est une petite auto comme l’Aveo ou la Cavalier (électrique en plus !) et sa valeur de revente est à l’avenant.
Désuet ? Pas sûr !
Antoine Joubert affirme que le gros du problème vient du fait que les VÉ deviennent rapidement désuets. Vraiment ? Je trouve qu’il exagère un peu. Il dit par exemple que les véhicules électriques de 5 ans (e-Golf, Leaf) pourrissent dans la cour des concessionnaires, car plus personne n’en veut. Moi j’ai souvent entendu dire qu’ils ne se vendent pas, car les concessionnaires ne se donnent pas la peine d’essayer de les vendre. Ils trouvent cela trop compliqué et préfèrent les vendre à des marchands spécialisés dans les VÉ comme Simon André ou JN Auto qui eux les vendent sans problème.
Et puis, à part l’autonomie qui est somme toute relative, en quoi deviennent-ils désuets ? Moi ma Spark va avoir 7 ans cet été et je ne la trouve pas désuète du tout ! J’ai visité la Côte-Nord avec l’an dernier ! Elle est toujours parfaite pour moi malgré ses 120 km d’autonomie. Comme voiture secondaire, ce genre de VÉ est super pratique et vous fera économiser plein d’argent ! Et ça, c’est pour les modèles de 5 ans et plus. Avec les nouveaux VÉ possédant 300, voir 400 km d’autonomie, je ne vois vraiment pas en quoi ils vont devenir désuets après 3, 4 ou 5 ans.
Pour justifier ses inquiétudes, Antoine Joubert lance des exemples un peu étranges comme le fait que les VÉ perdent de l’autonomie l’hiver, mais qu’on va peut-être régler ce problème bientôt, faisant ainsi chuter le prix de tous les autres VÉ. Personnellement, j’en doute ! Tant que la batterie va chauffer l’habitable des VÉ l’hiver, il en sera ainsi. La seule façon de changer ça serait d’installer une chaufferette à pétrole sous le tableau de bord !
Ensuite, il dit qu’un véhicule électrique se recharge actuellement à la maison en 8-10 heures : « Peut-être va-t-il se recharger en 2 heures dans le futur, on ne sait pas… » Entre vous et moi, quand on recharge son véhicule le soir, qu’il soit prêt à 2 heures du matin ou au moment où on le reprend le lendemain, ça change quoi ? C’est sûr que ça serait amusant d’avoir des bornes rapides de plusieurs milliers de watts sur son terrain, mais qui va vouloir payer les infrastructures d’une telle installation ? Vivement, laisser les bornes rapides aux abords des autoroutes !
Bref, on a l’impression en écoutant cette vidéo que M. Joubert ne croit pas beaucoup aux bien-fondés des VÉ. S’il était convaincu que le réchauffement de la planète est un problème crucial et qu’on doit tous faire notre part et qu’il n’y a pas de temps à perdre, il tiendrait un autre discours, il me semble.
Cela dit, je n’ai rien contre ce journaliste ! Je suis conscient qu’il y a des gens qui restent attachés aux voitures thermiques ou qui doutent de l’urgence climatique. Tout le monde a le droit a ses opinions. Et puis, c’est possible que je me trompe. Il voulait peut-être simplement prendre la défense des consommateurs dans ce vidéo, sans tenir compte du plaisir de rouler électrique et de tous les avantages pour l’environnement.
Allez voir par curiosité cette vidéo qui m’a fait sourciller (en cliquant sur ce lien, durée : 6 min 50 sec). Ai-je raison de penser que ce journaliste enlève l’envie aux gens de s’acheter un véhicule électrique et que si tout le monde parlait comme lui, la transition énergétique avancerait à pas de tortue ? C’est peut-être moi qui aime trop les VÉ et qui ne veux pas que personne en parle en mal ! (Rires !)
Mais attention, que je ne vois personne dire des méchancetés à Antoine Joubert dans les commentaires ! Nous les électromobilistes, nous sommes des gens respectueux et civilisés. Si je parle de cela aujourd’hui, c’est simplement pour sensibiliser les gens qui ont un micro qu’il est important de toujours bien expliquer le contexte quand on parle d’électrification des transports et pas seulement s’en tenir aux petits intérêts égoïstes de chacun.
Je suis allé sur Internet
Vous savez ce que j’ai fait après avoir écouté cette vidéo ? Je suis allé sur Internet pour voir si c’était vrai que les Bolt d’occasion se vendaient à des prix ridicules. J’ai fait comme si je me cherchais une Bolt 2017-2018. Quel prix demande-t-on en moyenne sur les sites ? Entre 25 000 $ et 30 000 $ selon qu’il s’agisse du modèle LT ou Premium, ce qui me semble tout à fait raisonnable. Et pour les e-Golf de 5 ans, elles se vendent autour de 19 000 $. Si elles pourrissaient dans la cour des concessionnaires, on les vendrait moins cher que cela, il me semble ! *
Et savez-vous ce que j’ai remarqué ? Eh bien étant donné que les Bolt ne sont pas chères aux États-Unis, des entreprises comme JN Auto ou Simon André les font venir, ce qui permet d’avoir de bonnes voitures éligibles au rabais de 4 000 $ du gouvernement du Québec ! Ces voitures ont parfois moins de 40 000 km !
Moi à la place d’Antoine Joubert, j’aurais dit que la dévaluation des Bolt aux États-Unis est une très bonne affaire pour les Québécois. Et pour ce qui est des propriétaires actuels, ils sont tellement heureux au volant de leur Bolt que personne ne souhaite les vendre ! C’est vrai ! Tous les sondages le disent. Quand on a goûté à l’électrique, pas question de revenir en arrière !