L’engouement que suscite Tesla est à son plus haut point depuis que l’entreprise a été créée. Son co-fondateur est devenu une véritable Rock-Star, et chacune de ses sorties publiques, que ce soit dans ses présentations ou sur Twitter, sont immédiatement reprises, analysées et acclamées à la fois. Au fil du temps, celui qui a fondé Paypal a petit à petit monopolisé l’image de Tesla. Imaginez-vous une seconde le patron de Ford, Nissan ou GM arrivant sur scène et étant acclamé par une foule d’admirateurs technophiles, pour le lancement d’un nouveau véhicule, que personne n’a jamais vu et dont 400 000 personnes vont verser 1000$ pour l’avoir dans peut-être 2 ans ? En comparant, on s’aperçoit vite que ce n’est pas comparable, mais qu’est-ce que Elon Musk a bien pu faire pour avoir autant de crédit et de popularité ? Après tout, il est plutôt profil bas, son élocution est hésitante, il est un tantinet nerd, et pourtant il gagne en popularité à chaque fois que l’occasion se présente. Si j’étais à la tête d’un manufacturier automobile, franchement j’aurais un sentiment de jalousie, mêlé à de l’humiliation et de la crainte, surtout en apprenant que Tesla n’occupe qu’une partie de son emploi du temps, alors qu’il partage sa semaine avec SpaceX, à envoyer des fusées dans l’espace et en les faisant revenir comme par magie sur le pas de lancement battant ainsi toutes les agences aérospatiales gouvernementales du monde.
Le but ultime de Tesla n’est pas de fabriquer des autos
Depuis les années 20, aucun nouveau manufacturier automobile n’avait vu le jour pour produire des véhicules en série aux USA, et surtout pas dans la Silicon Valley. Mais pour bien comprendre Tesla, il faut bien connaître Elon Musk et voir plus loin que la simple production de voitures électriques. En réalité, contrairement à Ford, GM, Nissan etc., le but ultime de Tesla n’est pas de fabriquer des autos, mais de se débarrasser du pétrole, et quand on a compris cet objectif on voit plus loin et on appréhende mieux les décisions de cette entreprise. Elon Musk est un véritable génie contemporain qui a eu l’opportunité de gagner énormément d’argent et qui a décidé de changer les choses qu’on pensait jusqu’alors impossible, et en ce sens, il restera assurément dans l’histoire.
Seulement voilà, jusqu’à maintenant Tesla a misé sur des produits chers, réservés à une élite et dont la marge de profit est plus facilement réalisable que sur des modèles plus modestes. Comment l’arrivée du Model 3 va-t-il participer à l’éclosion de Tesla sur un marché de production de masse. Ce modèle entre déjà en compétition avec la Bolt, sortie depuis plusieurs mois et la future Nissan Leaf prévue pour septembre. Fini la récréation, Tesla n’est plus seul à dominer un marché de niche, il entre en compétition frontale avec les grands manufacturiers qui font beaucoup de profits sur d’autres véhicules SUV et qui ont les moyens d’investir pour vendre à perte s’il le faut des véhicules électriques qui vont redorer leur image et satisfaire aux exigences des lois zéro émissions. C’est vrai qu’il y a eu 400 000 reservations du futur modèle, mais même si tout se passe comme prévu, en admettant qu’il n’y ai aucun rappel et que tous ceux qui ont réservés achètent, que se passera-t-il après ? Est-ce que les commandes vont continuer d’affluer ? Le marché des SUV est actuellement le plus en croissance, pourquoi les consommateurs se contenteraient-il d’une petite berline avec peu de volume de rangement?
Tesla a-t-il ou non besoin des incitatifs gouvernementaux ?
Il faut aussi ajouter que Musk s’est retiré du conseil consultatif suite à la décision de Trump de se retirer de l’accord sur le climat de Paris. Beaucoup ont réagit en se demandant ce que faisait Elon à ce conseil et je crois que la meilleure réponse est que Tesla a besoin que le fédéral continue de subventionner à hauteur de 7500$ l’achat de nouveaux véhicules électriques, particulièrement pour la fourchette de prix du Model 3. En se retirant, qu’adviendra-t-il de ce programme ? On a constaté ailleurs, que lorsque les incitatifs d’achat sont supprimés, les ventes de nouveaux véhicules électriques chutent considérablement. Aujourd’hui Elon Musk prétend que malgré le lobbying investit, Tesla n’en n’aurait pas besoin (Source en anglais), je crois qu’il tente de rassurer les actionnaires.
Le risque pris par Tesla pour le Model 3 est élevé, très élevé, un des pires scénarios serait qu’il y ait un rappel de sécurité sur toutes les autos vendues, comment ferait alors Tesla pour répondre à la demande alors qu’ils n’ont qu’un seul centre de services au Québec. Comment vont-ils faire pour assumer de tels frais, surtout s’ils doivent sous traiter. Comment Tesla pourrait gérer une telle situation de crise ?
De nouvelles batteries, mais quel est le gain ?
J’aimerais vous parler de la nouvelle génération de batteries qui équipera votre magnifique Model 3 mais au moment où j’écris ces lignes on ne sait pas grand chose, entre la spéculation et les discussions de comptoir, on sait que les cellules seront des Panasonic 2170 en remplacement des 18650 qui équipent les S et X. La différence étant la taille des cellules qui offrent un volume 47% plus grand (diamètre de 21mm x 70mm de hauteur contre 18x65mm), il en faudra moins et donc ça coûtera moins cher à assembler dans le bloc de batteries. La chimie est différente et devrait offrir une meilleure densité d’énergie, et là c’est à peu près tout ce qu’on sait. On a parlé d’améliorer la vitesse de charge, mais rien ne permet d’anticiper cela avec les données qu’on possède actuellement.
Elon Musk, un génie qui carbure à la prise de risque
Elon l’a démontré à plusieurs reprises, c’est un preneur de risques, on pourrait même croire qu’il carbure à cela, et jusqu’à maintenant ça a plutôt bien fonctionné. Malgré toutes ces incertitudes, le Model 3 va avoir beaucoup à offrir sur la compétition, il n’y a qu’à penser au réseau de Superchargers qui continue à se densifier et qui permet de recharger plus de 400km d’autonomie à l’heure. Le Model 3 nous permettra comme toute Tesla de voyager jusqu’en Floride ou de traverser le continent sans aucun compromis, ce qui est loin d’être le cas pour la Bolt. Aussi, la promesse d’une conduite entièrement autonome qui permettra non seulement de travailler ou dormir pendant son voyage mais également adhérer au “Réseau Tesla” et mettre son petit bijou à disposition pour de la location sur demande, imaginez compenser vos versements mensuels grâce à ce réseau d’auto-partage automatisé. Personnellement je ne me sers pas de mon auto la semaine, alors pourquoi ne pas la laisser à disposition et gagner de l’argent avec ça. L’idée du réseau Tesla est de la vraie vision, quelque chose que seul Elon Musk peut nous apporter dans un délai relativement court et a probablement une décennie d’avance sur la compétition. J’ai la conviction qu’une fois de plus Tesla va aller au delà de nos attentes et je trouve cela particulièrement fascinant, pas vous ?
