Le lancement du prototype du Nikola One par Nikola Motor (https://nikolamotor.com ), le 1er décembre dernier, a été pour le moins spectaculaire. Le fondateur et président de la nouvelle compagnie, Trevor Milton, a fait une présentation très enthousiaste de son bébé, dont le design est particulièrement réussi, avec des courbes très aérodynamiques, comme vous pouvez le constater sur la photo ci-dessous. L’esthétique du tracteur routier électrique de même que l’ergonomie et la grandeur de sa cabine doivent faire rêver les camionneurs, surtout avec les performances qu’il affiche.
On sait qu’un camion lourd électrique uniquement à batterie qu’on recharge sur le réseau n’est pas réalisable présentement. Mais, il est important de faire une analyse détaillée du Nikola One pour voir si l’hydrogène liquide alimentant une pile à combustible est bien la voie à suivre pour électrifier les camions lourds.
J’ai fait cette analyse dans un document de 13 pages qu’on peut télécharger ICI. Ce document facile à lire, avec plusieurs références. En voici les titres des sections.
- Six moteurs électriques lui donnent des performances inédites
- Une batterie de 320 kWh et une pile à combustible à hydrogène
- L’aspect sécurité, du pour et du contre
- Plus léger
- Des centrales solaires pour produire l’hydrogène et 364 stations-service pour le distribuer en Amérique du Nord
- Une utilisation inefficace de l’électricité renouvelable
- Une gigantesque quantité d’électricité
- Un prix optimiste pour l’hydrogène
- Il va falloir changer la pile à combustible aux deux ans
- Des coûts d’opération et de propriété optimistes
- Des livraisons de marchandises à la Uber
- Faisons le point
- Peut-on faire autrement
- Conclusion
Je vous invite à consulter les sections qui vous intéressent et je reproduis la conclusion ci-après.
Conclusion
Une chose est certaine, Nikola Motor nous a montré de façon magistrale la supériorité d’un groupe de propulsion-traction électrique pour les camions lourds, tant au niveau des performances que de certains points plus sécuritaires [moindre distance de freinage, plus bas centre de gravité impliquant moins de risque de renversement, système d’antidérapage, meilleure visibilité]. Et le design très aérodynamique du Nikola One avec beaucoup plus d’espace pour la cabine et une meilleure visibilité font sûrement rêver les camionneurs. Toutefois, l’utilisation de l’hydrogène soulève des craintes justifiées en ce qui concerne la sécurité, dû au caractère explosif de ce gaz dont la manipulation serait mise entre les mains de non spécialistes, à grande échelle.
En 2015, Nikola Motor avait opté pour un système hybride incluant une turbine au gaz naturel, mais en 2016 la compagnie se dirige maintenant vers un système incluant une grosse batterie (320 kWh) et une pile à combustible de 200 kW alimentée à l’hydrogène. Ils ont choisi la filière hydrogène liquide et comptent le produire par électrolyse avec de l’énergie renouvelable. Mais, comme nous l’avons vu, cette filière consomme 3,5 fois plus d’électricité qu’un camion électrique dont on recharge la batterie sur le réseau, ce qui se conjugue mal avec le développement durable.
De plus, alors que Nikola Motor estime le coût de son hydrogène à 3,5 $/kg, le Département de l’énergie étasunien (DoE) a fixé comme objectif 5 $/kg en 2020, lorsque produit à grande échelle, ce qui ne devrait pas réellement être le cas, compte tenu des retards de la filière hydrogène pour pénétrer le marché. Nous avons soulevé d’autres points également qui démontrent que Nikola Motor est plutôt optimiste quant aux coûts impliqués dans leur projet, ce qui pointe vers un risque financier important. N’oublions pas que les sommes impliquées vont être colossales. Comme nous l’avons vu, ça va prendre à terme l’équivalent en panneaux solaires de la puissance d’environ 10 centrales hydroélectriques comme Manic 5, soit 15 GW! Et c’est sans compter la production et la distribution de l’hydrogène liquide dans 364 stations en Amérique du Nord.
Bien qu’il ne soit pas encore possible présentement d’avoir un camion lourd électrique entièrement à batterie, nous avons vu qu’on pourrait avoir une batterie de 400 kWh environ et un prolongateur d’autonomie au diesel et/ou biocarburant 2G, qui permettraient de parcourir 75 % de ses km à l’électricité et de consommer 8 fois moins de carburant. Il suffirait de faire une recharge lente la nuit et deux recharges rapides le jour (25 minutes).
Ainsi, le système de recharges sur le réseau électrique permettrait, par rapport à la filière hydrogène, de diminuer énormément les coûts d’infrastructure, les risques financiers, de même que la ponction sur les ressources naturelles qui seraient utilisées pour fabriquer 3,5 fois plus de panneaux solaires que nécessaire.
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