Partout au Québec, les bornes rapides (BRCC) poussent comme des champignons. Partout, sauf dans l’île de Montréal qui ne possède qu’une seule BRCC. Quand on regarde le nombre de bornes par habitants, c’est clairement la région où le ratio est le plus bas considérant qu’il y a presque 2 millions d’habitants sur l’île. Il y en a 2 sur la Rive-sud, 2 sur la rive Nord et 3 à Québec / Lévis. Pourtant, la borne rapides est un élément fondamental dans la décision d’achat d’un véhicule électrique. Plus il y aura de BRCC, plus les gens seront intéressés à posséder un VÉ et plus ils vont l’utiliser (et plus ils vont laisser leurs voitures à essence à la maison).
Pour 2016, quelques BRCC sont prévues au centre-ville, mais rien d’autre n’a encore été annoncé pour le reste de l’île. Donc, il faudra peut-être attendre plus de 2 ans afin d’avoir une facilité de déplacement électrique complète dans l’île.
Ça fait longtemps que je pense comme bien d’autres observateurs que les bornes rapides sont cruciales afin d’accélérer l’électrification des transports. Comme je n’ai pas accès à une borne de recharge à la maison, j’ai donc profité de la période des Fêtes pour louer une Kia Soul EV et voir si c’est possible de posséder un VÉ sans pouvoir recharger à la maison. Voici quelques observations.
La BRCC est plus facile à intégrer à sa routine
Clairement, la borne rapide est plus facile à intégrer à la routine. Dans un contexte urbain, utiliser une borne de niveau 2 signifiera de chercher une borne disponible, de s’y rendre, puis d’aller déplacer le véhicule électrique par la suite afin de libérer la place rapidement.
Logiquement, la tarification va incitera les utilisateurs à laisser l’auto le moins longtemps possible, ce qui va donc créer un certain stress pour l’utilisateur qui veut limiter les frais d’utilisation. Par contre, la borne rapide permet soit d’arrêter quelques minutes à la fois quand on passe à proximité d’une borne rapide ou bien de faire quelques courses très rapides pendant la recharge.
Le temps de lire ses courriels et de planifier sa journée et on est prêt à repartir.
À moins d’être au coin de la rue, la recharge de niveau 2 est peu pratique.
Comme j’habite à 15 minutes de marche de la borne la plus proche, aller faire recharger un VÉ n’est pas très pratique en hiver quand je n’ai pas accès à Bixi. Il faudrait avoir des bornes à moins de 5 minutes de marche pour permettre à un résident de toujours recharger son véhicule avec une borne de niveau 2. Surtout, il faut prendre en compte que les bornes ne seront pas toujours libres et qu’il faudra parfois aller à l’autre borne la plus proche. Donc, si toutes les bornes sont à 15 minutes de marche, ça rend cette solution peu pratique.
À l’opposé, les bornes rapides offrent un rayon d’action beaucoup plus grand. À la borne rapide de Montréal, j’ai d’ailleurs rencontré un propriétaire d’une iMiEV qui disait venir régulièrement de Montréal-Nord pour se recharger.
La recharge rapide est là pour les urgences ou les imprévus
J’ai vécu une expérience typique qui montre que les imprévus sont fréquents et peuvent avoir des conséquences très désagréables pour un utilisateur d’auto électrique. Par exemple, j’ai décidé d’utiliser la Soul de Kia pour aller reconduire ma mère à l’aéroport. Je pensais avoir assez d’autonomie pour faire l’aller-retour. Mais arrivé à l’hôtel, nous avons réalisé que la réservation avait été faite à un hôtel à l’ouest de l’aéroport. Comme il y a des bornes de niveau 2 dans le coin, je pouvais prendre une chance de continuer. Par contre, au retour, j’ai eu la mauvaise surprise de réaliser que l’autoroute 40 était fermée, ce qui a créé un bouchon de presque 1 h. Heureusement, il ne faisait pas trop froid. J’ai donc pu limiter au maximum mon utilisation du chauffage afin d’éviter la panne. Mais ce n’était tout de même pas très agréable et j’avais les pieds gelés lorsque que je suis arrivé à destination.
S’il y avait au moins une borne rapide à proximité de l’aéroport, j’aurais pu faire un léger détour et revenir à la maison en toute quiétude.
La recharge rapide permet de parcourir plus de km
C’est une évidence, mais avec les modèles les plus populaires actuellement, l’absence de BRCC à proximité de notre destination peut limiter grandement l’autonomie, surtout en hiver. Pour quelqu’un qui veut simplement faire une course à Montréal, l’absence de borne rapide à proximité peut l’obliger à prendre un véhicule à essence ou à choisir un autre commerce à l’extérieur de l’île.
C’est généralement moins cher
Avec la Soul, j’ai pu charger régulièrement à 110 ampères (50 kWh) jusqu’à 70% de charge quand il ne faisait pas trop froid. Avec la tarification actuelle, je pouvais donc ajouter environ 10 kWh en 15 minutes. Avec les tarifs actuels (10 $ l’heure), il faut ainsi charger au moins 90 minutes pour ajouter autant d’énergie dans la voiture avec une borne de niveau 2 (2,50 $).
Les BRCC rechargent plus d’autos
En ville, les espaces de stationnement sont rares. L’utilisation de la recharge 240 V monopolise donc de précieuses places pendant plusieurs heures. Grâce à la recharge rapide, les voitures en libre service et les taxis pourront donc retourner sur la route plus rapidement. Plusieurs résidents pourront aussi accéder plus rapidement à des solutions de recharge. Si on veut vraiment permettre à tous les montréalais qui désirent avoir une auto électrique d’avoir accès à plusieurs bornes 240V à proximité de leur maison, ça risque de prendre beaucoup de temps et l’offre risque de ne pas suivre la demande. En effet, si la voiture électrique devient très populaire dans un quartier précis, ça risque de prendre du temps à la ville avant de s’ajuster et d’ajouter des bornes. Par contre, avec les bornes rapides, il sera possible de suivre la demande très facilement en ajoutant des BRCC dans les endroits où le besoin est là.
En terme de capacité, on peut dire qu’une BRCC peut facilement fournir 320 kWh par jour (16 heures à 2 recharges de 15 min. à l’heure). Avec un service de valet, une BRCC pourrait fournir théoriquement 720 kWh par jour. Dans un contexte où des voitures capables de se stationner et se connecter automatiquement devraient arriver sur le marché bientôt, les BRCC semblent offrir une utilisation des ressources beaucoup plus efficace.
De son côté, une borne de niveau 2 va difficilement fournir plus de 40 kWh par jour ( 3 recharges de 16 kWH). Et la limite théorique de 160 kWh par jour est très difficilement atteignable.
Quand on regarde sous cet angle, on voit clairement que malgré son coût d’achat et d’installation plus élevé, la BRCC offre un rendement beaucoup plus intéressant. Il faut donc accélérer l’implantation de ces bornes si on veut réellement accélérer l’électrification des autos sur l’île de Montréal.
Vincent Dussault
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Citadin adepte de transport alternatif, je m'intéresse depuis plusieurs années à l'auto électrique. Comme je me déplace principalement en vélo et à pied, j'ai à coeur l'amélioration de la qualité de l'air des villes. Je crois également que l'indépendance énergétique du Québec pourrait grandement nous aider à relever les défis financier qui attendent les québécois.
Je m'intéresse tout particulièrement à l'autopartage dans toutes ses formes. Je partage des liens sur ce sujet à www.twitter.com/autopartagemtl