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VÉ Québec 2030, suivons la Norvège avec 6 ans de retard

Dans un article antérieur intitulé 3 millions de VÉ légers en 2030 si on veut s’approcher de nos engagements, j’avais démontré que pour s’approcher de nos engagements de réduction de nos émissions de GES pour 2030 il fallait fixer un objectif de 3 millions de VÉ légers à cette date, trois fois plus que l’objectif actuel. Mon argumentaire était uniquement basé sur la réduction des GES, sans points de référence pour comprendre ce que cela signifiait en termes de ventes annuelles de véhicules électriques légers (VÉL) neufs d’ici 2030, et sans comparaison avec le champion mondial de l’électrification, la Norvège, question de jauger l’effort requis.

Dans le présent article, je vais donc évaluer combien de VÉL cela prendrait au Québec en 2025 et 2030, si on veut suivre les traces de la Norvège. C’est ce qu’on appellera le scénario de leader.

D’entrée de jeu, il faut savoir qu’au Québec en 2019 le pourcentage de véhicules légers neufs vendus qui étaient électriques (tout électrique ou hybride rechargeable) a été de 6 %. Or, la Norvège en était à 6 % en 2013, donc il y a 6 ans. C’est pour cela qu’on retrouve dans le titre « suivons la Norvège avec un retard de 6 ans ». L’idée étant que le Québec fasse d’ici la fin 2025 ce que la Norvège a fait de 2013 à 2019.

Les statistiques pour le Québec et la Norvège

Commençons par les statistiques officielles pour le Québec. Selon la Banque de données des statistiques officielles sur le Québec, il y avait 5 251 200 automobiles et camions légers (< 4 t) et 153 235 camions routiers moyens et lourds immatriculés au Québec en 2018. Par ailleurs, selon AutoMédia, en 2018 il s’est vendu 450 966 véhicules automobiles légers routiers neufs au Québec. On peut donc en conclure que 8,5 % de la flotte a été renouvelée en 2018 et que cela prend environ 12 ans pour renouveler la flotte au complet. Maintenant, selon l’AVÉQ, en 2019 il s’est vendu 27 248 véhicules électriques légers (tout électrique et hybrides rechargeables) au Québec. En divisant par 450 000 véhicules légers neufs vendus par année au Québec, en moyenne, on constate que la part de marché des VÉL neufs a atteint 6 % des ventes en 2019 au Québec.

En ce qui concerne la Norvège, je vous réfère à l’article de Zachary Shahan de Clean Technica intitulé The EV Adoption Ramps in 4 Top Electric Vehicles Countries, daté du 24 janvier 2020. Voici la courbe de progression des ventes de VÉL en Norvège, selon les données de cet article.

Si le Québec suivait les pas de la Norvège, avec un décalage de 6 ans, 56 % des ventes de véhicules légers neufs seraient des VÉL en 2025. Bien sûr, la Norvège a des incitatifs pour les VÉL beaucoup plus imposants qu’au Québec et des surtaxes énormément plus salées pour les véhicules énergivore thermiques. Sans compter que le litre d’essence affiche un prix de 2,65 $ CAN à la pompe en Norvège. Par contre, électrifier les transports routiers en 2013 était beaucoup plus difficile qu’aujourd’hui (moins de modèles, véhicules plus chers et manque d’infrastructure de recharge).

Un scénario de leader pour le Québec de 2020 à 2025

Il me semble donc tout à fait raisonnable de fixer un scénario de leader pour nos objectifs d’électrification au Québec à 50 % des ventes de véhicules légers neufs en 2025. Pour en arriver là, il faudrait que l’évolution du taux de pénétration des ventes de véhicules légers neufs soit semblable au graphique ci-dessous (une de mes diapos).

Pour évaluer le nombre de VÉL sur les routes du Québec en 2025, nous considérerons que les ventes annuelles de véhicules légers neufs seront de 450 000 en 2020 (même chose qu’en 2018) et qu’elles augmenteront de 5 000 véhicules par année d’ici 2025. Il suffit alors de multiplier les pourcentages de ventes annuelles prévus selon le graphique ci-haut, par les ventes totales de véhicules légers neufs prévues pour chaque année, afin d’obtenir le nombre de VÉL qui s’ajoutent au parc à chaque année. En additionnant ces chiffres annuels avec le nombre de VÉL déjà sur nos routes au 31 décembre 2019 (66 639), on obtient 843 000 VÉL sur les routes du Québec en 2025, en arrondissant au millier près. Notons que, dans ce scénario de leader, les ventes de VÉL pour l’année 2025 seraient de 237 000 unités et que le pourcentage de VÉL sur les routes au Québec cette année-là serait de 15 % (843 000 ? 5 600 000).

2025, le point de basculement pour les VÉ

Rendu en 2025, la plupart des experts s’entendent pour dire que le prix à l’achat d’un véhicule électrique neuf à batterie avec une autonomie de 400 km serait le même que celui d’un véhicule à essence de même catégorie. Par contre, les économies en carburant et entretien du véhicule électrique dépasseraient 1 000 $ par année, alors que les bornes de recharge ultra-rapides seraient en grand nombre et couvriraient une très large portion du territoire. Sans compter que les véhicules à essence neufs achetés en 2025 vont avoir une chute importante de leur valeur de revente en 2030, puisque la part de marché de ces véhicules va décroitre beaucoup de 2025 à 2030 et qu’ils vont devenir difficiles à revendre.

Le choix, en 2025, face à l’achat d’un véhicule électrique ou d’un véhicule à essence va donc être de gagner plus de 5 000 $ sur 5 ans avec un véhicule électrique ou perdre plus de 5 000 $ sur 5 ans avec un véhicule à essence, une différence de plus de 10 000 $, soit 2 000 $ par année. Dans ces conditions, qui va vouloir d’un véhicule à essence après 2025? On va avoir traversé le point de basculement de la pénétration des VÉL et l’électrification va s’accélérer de 2025 à 2030. Surtout que les modèles électriques disponibles sur cette période vont être bien plus nombreux qu’aujourd’hui et qu’il y en aura pour toutes les bourses.

Un scénario de leader de 2025 à 2030

Alors, si le taux de pénétration des véhicules électriques pour les ventes de véhicules légers neufs en 2025 est de 50 %, on peut s’attendre à ce qu’il grimpe à 90 % en 2030, dans un scénario de leader. Pour en arriver là, l’évolution des taux de pénétration des VÉL ressemblerait à ceux du tableau suivant.

Le chiffre à retenir de ce dernier tableau est bien sûr le nombre total de VÉL qu’il y aurait sur les routes du Québec en 2030, selon notre scénario de leader, soit 2 685 050 VÉL, ou approximativement 45 % du parc de véhicules légers québécois à cette date. Et, pour y arriver, on sait qu’il va falloir des efforts similaires à ceux de la Norvège, sans aller, toutefois, dans les extrêmes pour les incitatifs et les surtaxes aux véhicules à essence ou au diesel énergivores.

Pour donner un autre point de comparaison, mentionnons l’étude de la firme conseil EY (280 000 employés) intitulée « Canadian electric vehicle transition – the difference between evolution and revolution », publiée à l’automne 2019. Selon les auteurs, en considérant leur scénario d’adoption rapide des véhicules électriques il y aurait 30 % de véhicules électriques au Canada en 2030 et 15 % selon leur scénario modéré. Notre scénario de leader pour le Québec serait donc dans leur terminologie un scénario d’adoption très rapide.

Un objectif de leader pour 2030 et résumé des résultats

Pour conclure, disons que, compte tenu de la réalité actuelle, l’objectif que le Québec devrait viser pour 2030 est de 2 500 000 VÉL si on veut être réellement un leader à l’échelle mondiale. Et si on peut faire mieux, faisons-le! Rappelons que l’objectif actuel du gouvernement du Québec est de 1 000 000 de VÉ en 2030, loin du compte pour être un leader en électrification des transports et se rapprocher de ses engagements de diminution des GES.

Le tableau suivant résume les résultats importants auxquels nous sommes arrivés dans cet article.

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