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Rouler électrique, c’est bon pour la santé! (3e texte de 4)

(Après un hiatus de quelques semaines sur l’argumentaire en faveur de la loi Zéro Émission, voici le 3e texte)
Depuis quelques mois au Québec a lieu un débat sur la loi Zéro Émission ainsi que sur sa règlementation. Un certain nombre de gens, d’organismes et de médias sont intervenus dans le dossier pour donner leur avis.
Dans une série de 4 textes, nous nous penchons sur les raisons qui démontrent qu’une telle loi est nécessaire.
Aujourd’hui, nous nous pencherons sur le lien pollution atmosphérique-santé du dossier.
Un impact positif… et sous-estimé pour la santé des Québécois.
Dans un article écrit il y a quelques semaines par le journaliste Vincent Brousseau-Pouliot de La Presse intitulé « Voiture électrique : le dilemme environnemental », ce dernier a écrit :
« L’étude du CIRAIG met toutefois un autre phénomène en relief : au Québec, une voiture électrique doit rouler au moins six ans (85 300 km) pour qu’elle soit véritablement plus verte qu’une voiture à essence en matière d’impact sur la santé.
En matière d’émissions de gaz à effet de serre, une voiture électrique devient avantageuse sur le plan environnemental après environ deux ans d’utilisation (29 000 km). »
Ces phrases sont tirées de l’analyse du CIRAIG, mais ne sont pas mises en contexte. Or, en ce qui a trait à la santé humaine, les gains pour les Québécois sont beaucoup de fait plus rapides que ce que l’analyse du CIRAIG affirme à cause de la pollution atmosphérique.
Voici pourquoi.
Le mandat du CIRAIG a été défini comme suit1:
« Hydro-Québec a mandaté le Centre international de référence sur le cycle de vie des produits, procédés et services (CIRAIG) afin qu’il réalise une analyse de cycle de vie comparative des impacts environnementaux potentiels du véhicule électrique et du véhicule conventionnel dans un contexte d’utilisation québécoise. L’objectif d’Hydro-Québec étant de déterminer dans quelle mesure l’utilisation d’un véhicule électrique alimenté par l’électricité québécoise peut s’avérer avantageuse sur le plan environnemental, comparativement au véhicule conventionnel (c.-à-d. avec un moteur à combustion interne) et ce, sur le cycle de vie des véhicules étudiés.
Le cycle de vie des véhicules inclut les étapes de production des composantes du véhicule et des batteries, de transport du lieu de production jusqu’à l’utilisateur, d’utilisation et de la fin de vie du véhicule. L’unité fonctionnelle sur laquelle l’étude se base est :
« Se déplacer au Québec sur 150 000 km avec un véhicule mis sur le marché en 2013 ».
Compte tenu des habitudes de déplacements des automobilistes québécois, cette unité fonctionnelle correspond à la distance moyenne parcourue en 10 ans, à raison de 40 km/jour, soit 15 000 km/an.
Il est important de noter que l’analyse comparative des impacts environnementaux potentiels ne cible pas un modèle de véhicule conventionnel ou électrique en particulier, mais cherche à représenter une gamme de véhicules représentatifs de ceux en circulation sur les routes du Québec. »
Donc, la demande d’Hydro-Québec est circonscrite au territoire Québécois.
Comme une infime minorité de composantes de véhicules électriques et à essence sont fabriqués au Québec, l’impact sur la santé de la fabrication d’une voiture (production des pièces du véhicule) risquent fort d’avoir un impact négligeable sur la santé des Québécois.
Que reste-t-il alors comme impact sur la santé pour les Québécois ?
Les impacts de l’utilisation de ces véhicules et de la fin de vie.
Si on se fie aux chiffres illustrés dans ce graphique émanant de cette même étude du CIRAIG, on obtient un impact sur la santé des Québécois issu de l’utilisation et de la fin de vie du véhicule environ 30 fois plus important avec un véhicule à essence qu’avec un véhicule électrique. Et ça, ce n’est qu’après 150,000 kilomètres. L’écart est encore plus grand après 200,000 ou 300,000 kilomètres, ce qui correspond plus à l’espérance de vie moyenne des véhicules sur nos routes.

Pourquoi ? Parce que lorsqu’il s’agit des émissions polluantes d’un véhicule à essence ou diesel, celles-ci sont très importantes.
On parle ici de :

  • Monoxyde de carbone : « Le monoxyde de carbone (CO) est un gaz asphyxiant qui peut être mortel. Il est simple, inodore, incolore, insipide et non irritant. Sa densité, de 0.976, est très similaire à celle de l’air, qui est de 1.0. Le CO se diffuse donc rapidement dans l’air ambiant. Il ne faut pas le confondre avec le CO2, qui est plus lourd que l’air.  Les véhicules sont LA principale source d’émission de monoxyde de carbone.

  • Diffusion du monoxyde de carbone dans l’organisme: L’absorption du monoxyde de carbone (CO) se fait exclusivement par les voies respiratoires. Il se diffuse très rapidement à travers les membranes alvéolocapillaires et placentaires. Le CO entre en compétition avec l’oxygène (O2), en prenant sa place sur l’hémoglobine, pour former la carboxyhémoglobine (COHb). Cette dernière est le résultat de l’association de l’hémoglobine avec le CO. L’affinité du CO avec l’hémoglobine (Hb) est de 200 à 250 fois supérieure à son affinité avec l’O2 et il diminue la délivrance d’O2 dans les tissus. De plus, l’affinité du CO pour l’hémoglobine fœtale est supérieure à celle de l’hémoglobine de la mère. »2
  • Composés organiques volatiles (COV) : « Ce sont des substances formées d’au moins un atome de carbone et un atome d’hydrogène. On les trouve à l’état gazeux dans l’atmosphère. Plusieurs de ces composés participent aux réactions photochimiques responsables de la formation de l’ozone troposphérique. D’autres, tels que le benzène et le formaldéhyde, sont aussi considérés comme toxiques et peuvent avoir des effets sur la santé ».3
  • Benzène : « Le benzène est classé par le CIRCcomme cancérogène avéré pour l’homme (groupe 1) sur la base de leucémies observées dans des études épidémiologiques et animales. L’inhalation est la voie principale d’exposition au benzène. Ses sources d’émission sont les processus de combustion (dont le tabagisme), le transport routier, et les activités industrielles. »4
  • Oxyde d’azote (NOx) : « Famille des oxydes d’azote couramment regroupé sous la formule NOx et comprenant les composés suivants : NO2, NO, N2O.
    Les oxydes d’azote comprennent le monoxyde d’azote (NO), le dioxyde d’azote (NO2), le protoxyde d’azote (N2O), le tétraoxyde de diazote (N2O4), le trioxyde d’azote (N2O3). Les composés analysés par les réseaux sont NO et NO2 dont la somme étant regroupée sous le terme d’oxydes d’azote (NOx). 
    Gaz odorant, très toxique dès lors que la teneur en volume dépasse 0,0013% (début de l’irritation des muqueuses) qui résulte de l’oxydation de l’azote de l’air ou du carburant avec l’oxygène de l’air ou du carburant dans des conditions de température élevée. Le monoxyde d’azote NO et le dioxyde d’azote NO2 sont émis lors des phénomènes de combustion. Le NO2 est issu de l’oxydation du NO. Les sources principales sont les véhicules (près de 60%) et les installations de combustion (centrales thermiques, chauffages…). Le pot catalytique a permis, depuis 1993, une diminution des émissions des véhicules à essence, mais l’effet reste encore peu perceptible compte tenu de l’augmentation forte du trafic et de la durée de renouvellement du parc automobile. Effet sur la santé : pénétration dans les plus fines ramifications respiratoires pouvant entraîner une dégradation de la respiration, une hyperréactivité des bronches chez les asthmatiques, une augmentation de la sensibilité des bronches aux infections microbiennes chez les enfants ».5

  • Particules fines : « Les particules fines sont des microparticules de moins de 0,25 micromètre de diamètre présentes plus ou moins longtemps dans l’atmosphère. Les particules fines sont également appelées PM en anglais, ce qui signifie particule matter.Les particules fines proviennent du trafic routier, plus particulièrement des moteurs diésels des voitures, camions et bus, mais également de l’industrie, de l’agriculture et de la combustion (cheminées, chauffage individuel…). » 

Selon un article de Science News du 19 septembre 2017 : « Particulates come from tail pipes and smokestacks, but also consist of tiny fragments shed from tires, roads and brake pads. »13
« Les particules fines vient des pots d’échappement et des cheminées, mais viennent aussi des pneus, des routes et des freins. »
Une source non négligeable d’émission de particules fines vient du freinage. Or, les véhicules électriques utilisent beaucoup moins les freins mécaniques, ce qui veut donc dire des émissions de particules fines beaucoup moindres pour les véhicules électriques que pour les véhicules à essence ou diesel.
 « Les particules fines pénètrent profondément dans l’arbre respiratoire, jusque dans les petites bronches et les alvéoles où s’effectuent les échanges gazeux. Les particules fines provoquent des manifestations respiratoires survenant quelques jours à quelques semaines après leur exposition. Elles sont responsables d’une réaction inflammatoire au niveau des bronches, aggravant ou déclenchant un asthme. Une augmentation du nombre de consultations et d’hospitalisations est observée lors des pics de particules fines.  Les personnes les plus touchées sont les personnes âgées, les femmes enceintes, les bébés, les personnes présentant des problèmes respiratoires (asthmebronchite chronique), des maladies cardio vasculaires, un diabète. »6 

  • Dioxyde de carbone : gaz nécessaire à la vie, le problème du CO2 réside dans le déséquilibre dû à une forte augmentation de CO2 qui cause le réchauffement climatique. La forte hausse de CO2 vient principalement de la combustion d’énergie fossile (pétrole, gaz naturel, charbon), de la production d’électricité et des transports. L’impact sur la santé humaine du réchauffement climatique est maintenant reconnu car il cause des vagues de chaleur et des catastrophes qui ont impact croissant et dévastateur sur les humains et les écosystèmes, des épisodes croissants de smog et des allergies en augmentation.7
  • Ozone troposphérique (O3) : « L’ozone est une forme particulière de l’oxygène. Contrairement aux autres polluants, l’ozone n’est pas émis par une source particulière, mais résulte de la transformation photo-chimique de certains polluants de l’atmosphère, issus principalement du transport routier. »8
  • Dioxyde de soufre (SO2) : « Il provient essentiellement de la combustion des matières fossiles contenant du soufre (comme le fuel, le diesel ou le charbon) et s’observe en concentrations légèrement plus élevées dans un environnement à forte circulation. C’est un gaz irritant. Des expositions courtes à des valeurs élevées (250?g/m3) peuvent provoquer des affections respiratoires (bronchites,…) surtout chez les personnes sensibles. 98


 Tout ce qui est cité plus est une liste de polluants atmosphériques qui sortent des pots d’échappement des véhicules à essence ou diesel sur nos routes et qui ont un impact certain sur notre santé.

1974 décès prématurés au Québec
Selon une analyse faite en 2007 par l’Institut National de Santé Publique, la pollution atmosphérique a causé au Québec en 200210 :

  • 1 974 (± 467) décès prématurés;
  • 38 (± 32) visites à l’urgence pour des problèmes cardiaques;
  • 414 (± 92) visites à l’urgence pour des problèmes respiratoires;
  • 246 705 (± 104 624) journées de symptômes d’asthme.

Si la pollution atmosphérique industrielle a diminué suite à des fermetures d’usines et de centrales au charbon en Ontario, la pollution atmosphérique associée aux transports n’a pas diminué car le parc de véhicules circulant sur les routes du Québec ne cesse de croître.
En fait, entre 1990 et 2015 :

  1. Le nombre de véhicules de promenade en circulation a augmenté de 66% ;
  2. Le nombre de véhicules commerciaux en circulation a augmenté de 43% ;

Hausse 3,5 fois plus rapide des véhicules que de la population entre 1990 et 2015
Selon l’Institut de la Statistique du Québec, la population du Québec3 est passée de 6 996 986 le 1er juillet 1990 à 8 259 452 le 1er juillet 2015, soit une augmentation de 18%. La hausse du nombre de véhicules de promenade circulant sur les routes du Québec a donc été plus de 3,5 fois plus rapide que l’augmentation de la population du Québec entre 1990 et 2015.
Il est important de comprendre que si les émissions de GES (CO2, méthane, etc) ont un impact globalisé, les émissions polluantes atmosphériques ont un impact local marqué et donc des effets locaux néfastes importants sur la santé des gens.
Comme aucun de ces polluants atmosphériques ne sort du pot d’échappement d’une voiture électrique, il est donc certain que les impacts positifs sur la santé des humains d’un véhicule électrique versus un véhicule à essence au Québec peuvent être ressentis dès le premier jour d’utilisation et non pas après 2 ou 6 ans comme l’affirme l’analyse du CIRAIG.
Pollution atmosphérique : une facture annuelle de $36 milliards !
En terminant sur le sujet des impacts sur la santé de la pollution atmosphérique au Canada, une étude publiée il y a quelques mois a calculé que les coûts de santé s’élevaient à environ $36 milliards pour la seule année 2015.11
Cette pollution atmosphérique émane de différentes sources dont :

  • L’industrie (pétrolière et autres)
  • Le transport
  • La production d’électricité
  • L’agriculture

Au Québec, très peu de pollution atmosphérique provient de la production d’électricité. De moins en moins de pollution vient de l’industrie pétrolière québécoise (presque toutes les raffineries au Québec ont fermé leurs portes depuis 30 ans. Sur 8 raffineries en opération à l’époque, il en reste 2 encore en opération : Suncor à Montréal et Valero à Lévis.12
Ce qui nous ramène aux transports.
 Voiture électrique = plus de marches !
Un effet intéressant, mais négligé du passage à la voiture électrique est une augmentation de la marche. En effet, lorsque nous possédons une voiture électrique, nous nous retrouvons plus souvent en situation où nous serons incités à marcher car la majorité des bornes de recharge ne sont pas situées exactement là où ne devons nous rendre, ce qui fait que bien souvent nous nous retrouvons à marcher plus que si nous étions en voiture à essence… ce qui, ma foi, est une excellente chose.
Bon pour la santé
Conclusion, si le virage des véhicules individuels, collectifs et de marchandise vers la motorisation électrique ne règlera pas tous les problèmes de pollution atmosphérique au Québec, il en règlera une bonne partie.
D’où la nécessité d’une Loi Zéro Émission musclée (sans oublier une série d’autres mesures pouvant modifier le paysage des transports au Québec : auto partage, covoiturage, télétravail, transport collectif, bonus-malus, etc) car la pollution atmosphérique liée aux transports a un impact certain sur les Québécois en ce qui a trait à leur santé ET aux coûts de santé qui ne cessent de croître.
En résumé, rouler électrique, c’est bon pour la santé !
1 : http://www.hydroquebec.com/developpement-durable/centre-documentation/pdf/analyse-comparaison-vehicule-electrique-vehicule-conventionnel.pdf
 
2 : http://www.msss.gouv.qc.ca/professionnels/sante-environnementale/monoxyde-de-carbone/
 
3 : http://www.mddelcc.gouv.qc.ca/air/cov/#presentation
 
4 : http://www.cancer-environnement.fr/248-Benzene.ce.aspx
 
5 : http://www.dictionnaire-environnement.com/oxyde_azote_nox_ID460.html
 
6 : http://sante-medecine.journaldesfemmes.com/faq/5361-les-particules-fines-et-la-pollution
 
7 : http://www.lapresse.ca/environnement/pollution/200904/17/01-847605-le-co2-declare-dangereux-pour-la-sante-publique.php
 
8 et 9: http://www.environnement.brussels/sites/default/files/user_files/airnet_effets_polluants_fr.pdf
 
10 : https://www.inspq.qc.ca/pdf/publications/817_ImpactsSanitairesPollutionAtmos.pdf
 
11 : http://www.cbc.ca/news/health/air-pollution-results-in-7-700-premature-deaths-in-canada-each-year-report-says-1.4140794
 
12 : http://www.journaldemontreal.com/2015/07/30/le-top-10-des-grands-pollueurs-au-quebec
 
13 : https://www.sciencenews.org/article/list-diseases-linked-air-pollution-growing
 
 
 
 

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