Il y a plusieurs théories sur les raisons qui poussent l’Arabie saoudite et les autres pays membres de l’OPEP à maintenir leur rythme de production de pétrole. Certains croient qu’ils souhaitent nuire à leurs compétiteurs qui ont des coûts de production plus élevés ou qu’ils veulent punir l’Iran et la Russie. D’après Elias Hinckley, conseiller stratégique en matière de pratiques énergétiques pour le cabinet d’avocats Sullivan et Worcester, ces raisons ne sont pas fausses, mais la vraie cause demeure plus profonde. Voici un résumé de l’article que ce dernier a publié sur Energy Post :
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Selon Hinckley, l’Arabie saoudite pressent la fin de l’ère du pétrole et comprend que, pour éviter qu’un réchauffement climatique catastrophique ne survienne, une grande partie du pétrole devra demeurer sous terre. L’Arabie saoudite profite donc du temps qu’il lui reste pour exploiter ses ressources au maximum, en faisait chuter les prix.
D’ailleurs, en 2000, le Sheikh Ahmed Zaki Yamani, ancien ministre du pétrole de l’Arabie saoudite, a donné une entrevue dans laquelle il a déclaré :
« Dans 30 ans, il y aura une quantité phénoménale de pétrole, mais aucun acheteur. Le pétrole sera laissé dans le sol. L’âge de pierre s’est terminé un jour, et ce n’est pas parce qu’il n’y avait plus de pierres. L’ère du pétrole s’achèvera aussi éventuellement, et ce ne sera pas parce qu’il n’y aura plus de pétrole ».
Dans l’éventualité de cette fin de l’ère du pétrole, l’Arabie saoudite considère qu’un baril vendu avec profit, même si celui-ci est moindre, c’est mieux qu’un baril non vendu.
Il est largement reconnu que l’Arabie saoudite affaiblit ses compétiteurs parce que le pays est capable d’endurer des profits moindres, puisque ses coûts d’exploitation sont moins élevés et qu’elle a le contrôle sur de grandes réserves mondiales. Mais même si le pays fait tomber certains concurrents et qu’il s’empare de grandes parts du marché, il reste qu’il sera difficile de remonter la pente après des centaines de milliards de pertes en profits.
En outre, l’Arabie saoudite voit qu’on est en train de vivre un changement radical sur le plan énergétique. Les États-Unis et la Chine se sont entendus pour établir des cibles de réduction des GES. 2014 est officiellement l’année la plus chaude de l’histoire de l’humanité. Un rapport publié dans Nature conclue également que pour que ne survienne pas un réchauffement climatique catastrophique, 82 % des réserves mondiales de pétrole doivent demeurer dans le sol.
Le monde s’entend donc pour dire qu’il faut réduire les émissions de GES, et les avancées technologiques offrent des alternatives viables à notre dépendance au pétrole. L’Arabie saoudite se rend donc compte qu’il s’agit d’une course à la production, peu importe le prix, afin que son pétrole ne demeure pas inexploité.
La fin de l’ère du pétrole n’est certainement pas pour demain (et probablement pas pour 2030 non plus), mais pour l’Arabie saoudite, cette fin n’est pas si loin non plus.