Depuis quelques mois, nous entendons parler de pays qui comptent interdire la vente de véhicules fonctionnant à l’essence et au diésel.
La France (2040), l’Angleterre (2040), l’Inde (2030) et la Norvège (2025) ont tous fixé des objectifs d’interdiction de ventes de ces véhicules.
Quand à l’Autriche, le Danemark, l’Irlande, le Japon, les Pays Bas, le Portugal, la Corée du Sud et l’Espagne, ils ont de leur côté fixé des cibles de vente de véhicules électriques.
Si ces engagements sont fort louables, il ne faut pas se méprendre. Cela ne signifie pas pour autant que ces pays interdiront la circulation de véhicules fonctionnant au pétrole. Nous risquons donc de voir sur les routes de France ou d’Angleterre des véhicules diesel et à essence à l’horizon 2050, 2060 et peut-être même 2070.
Des villes vont encore plus vite
De leur côté, des villes telles que Paris, Los Angeles, Vancouver, Auckland, Barcelone, Cape Town, Copenhague, Mexico, Milan et Quito1 se sont engagées à interdire la circulation de véhicules diésel et à essence dans au moins une partie de leur territoire à l’horizon 2030 ET que tous les autobus y circulant soient « zéro émission » d’ici 2025.2
Cette annonce va donc beaucoup plus vite et loin que celles des pays cités plus haut car on ne parle pas ici d’interdire la vente, mais bel et bien la circulation de véhicules diesel et à essence, ce qui est tout autre.
Selon l’Organisation Mondiale de la santé (OMS)3, la population vivant en zones urbaines représentait 54% de la population mondiale en 2014 alors qu’elle ne représentait que 34% de la population mondiale en 1960. Il s’agit donc d’une augmentation de 60% de la proportion de gens résidant dans les villes en 54 ans.
C’est pourquoi, alors qu’une majorité croissante de la population mondiale vit dans les villes, cet engagement de la part de villes aussi reconnues que Paris et Los Angeles est si significatif.
Et le Canada, le Québec et Montréal ?
Ce qui nous amène au Canada, au Québec et à Montréal.
En mai dernier, M. Marc Garneau, ministre des transports du gouvernement canadien, a annoncé qu’il mettait sur pied un comité consultatif4 composé de gens de l’industrie, de divers paliers de gouvernements ainsi que de représentants issus du milieu de l’environnement afin de stimuler l’essor des véhicules zéro émission.
Nous devrions ainsi voir le résultat du travail de ce comité via le dévoilement d’une stratégie nationale au printemps 2018.
Ce amène les questions suivantes :
Au fédéral :
- Le gouvernement fédéral annoncera-t-il une interdiction des ventes de véhicules diésel et à essence à l’horizon 2025, 2030 ou 2040 tels que l’ont fait la France, l’Angleterre, l’Inde et la Norvège ?
- Y aura-t-il une loi Zéro Émission fédérale ?
- Est-ce que le gouvernement du Canada annoncera finalement des rabais à l’achat de véhicules zéro émission comme le font à peu près TOUS les pays industrialisés sauf le nôtre… ou peut-être même un bonus-malus?
Au Québec :
Du côté du Québec, une consultation organisée par l’organisme Transition Énergétique Québec (dont une partie porte sur les transports) est présentement en cours. On peut d’ailleurs lire sur leur site web5 :
« Voici les mesures envisagées par le gouvernement pour réaliser la transition énergétique dans ce secteur.
Votez, commentez ou proposez de nouvelles mesures plus appropriées.
La consultation en ligne se déroule jusqu’au 8 décembre 2017.
Mise en contexte
Afin de structurer et de prioriser les objectifs et moyens d’intervention dans le secteur des transports, il est proposé d’utiliser l’approche d’analyse « réduire-transférer-améliorer » où :
- réduire réfère à la diminution des besoins de déplacements motorisés ou des distances à parcourir pour répondre aux besoins existants de déplacements;
- transférer réfère au passage de l’utilisation d’un mode de transport énergivore à des services de transport qui sont plus efficaces tant sur le plan énergétique qu’environnemental;
- améliorer réfère à l’usage de véhicules plus efficaces et à l’empreinte carbone diminuée. »
Lorsqu’on jette un coup d’œil sur les propositions évoquées dans le cadre de cette consultation, on peut en voir certaines qui sont fort intéressantes telles que :
« Devrait-on favoriser l’acquisition de véhicules écoénergétiques avec des mesures de type bonus-malus? »
Bref, la suite des choses sera très intéressante à suivre de ce côté. Je vous invite d’ailleurs à y participer:
https://consultation.teq.gouv.qc.ca/project/transport-de-personnes/consultation/consultation-10
Et il ne faut par ailleurs pas oublier que nous devrions bientôt connaître la mouture finale de la Loi Zéro Émission québécoise.
À Montréal :
Considérant l’arrivée d’une toute nouvelle administration municipale qui est perçue comme plus progressiste et verte que la précédente, est-ce que Montréal emboîtera le pas à Vancouver afin de faire de la métropole québécoise la 2e ville canadienne qui s’engagera à ce que les véhicules fonctionnant au pétrole soient bannis dans au moins une partie de la ville d’ici 2030 ET à ce que tous les autobus en circulation soient zéro émission en 2025?
Et la STM?
Il est bon de rappeler que la STM est très loin d’un tel engagement. Lorsqu’on regarde sur leur site web, on peut d’ailleurs y lire ceci:
“Avec l’annonce de l’achat de 40 nouveaux véhicules électriques, nous visons à accélérer notre familiarisation avec les différentes technologies en vue de l’acquisition de bus électrique dès 2025, si la technologie le permet.”6
La STM ne se positionne donc pas du tout en leader d’autobus zéro émission si elle dit envisager l’achat d’autobus uniquement électriques à partir de 2025. Considérant que les autobus sont achetés pour durer 16 ans, ça nous amène au minimum en 2041 avant que tous les autobus de Montréal soient zéro émission, soit environ 1/4 de siècle après Shenzhen!
Quand on sait que la ville de Shenzhen en Chine (11,9 millions d’habitants) voit déjà circuler 14,000 (!) autobus 100% électriques et que tous les autobus de cette ville seront 100% électriques d’ici la fin 2017 pendant que la STM a une impressionnante flotte… de 3 autobus 100% électriques, on ne peut certainement pas qualifier la STM de leader.(7)
Et si Montréal fait cette annonce, s’assurera-t-on que les résidents aient accès à des véhicules zéro émission en auto partage et en covoiturage ? Et est-ce que Montréal aura finalement un réseau de bornes rapides digne de ce nom ?
Il reste beaucoup à faire
Quelles que soient les directions que prendront ces 3 paliers de gouvernement, la dure réalité est qu’il reste énormément de travail à faire pour diminuer de façon significative nos émissions polluantes et de GES en transports.
Pour y arriver il faudra donc que tout le monde, c’est-à-dire les gouvernements, les citoyens, les institutions, les syndicats et les entreprises mette la main à la pâte.
Sinon, on n’y arrivera pas.
1 : http://www.news1130.com/2017/10/23/vancouver-mayor-signs-international-fossil-fuel-free-cities-pledge/
2 : http://www.sustainablebrands.com/news_and_views/leadership/sustainable_brands/c40_mayors_commit_deliver_zero-emission_transport_citie
3 : http://www.who.int/gho/urban_health/situation_trends/urban_population_growth_text/en/
4 : http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1036138/ottawa-groupe-consultatif-essor-vehicule-zero-emission-electrique-garneau-caa-salon-montreal
5 : https://consultation.teq.gouv.qc.ca/project/transport-de-personnes/consultation/consultation-10
6 : http://www.stm.info/fr/a-propos/grands-projets/electrification-du-reseau-de-surface/bus-electrique
7 : https://cleantechnica.com/2017/11/12/100-electric-bus-fleet-shenzhen-pop-11-9-million-end-2017/