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GES des camions lourds : Écocamionnage doit être relancé… et revu.

Un secteur dont on parle trop peu dans la lutte aux changements climatiques est celui des émissions de GES des véhicules lourds de marchandise.
Pourtant, on devrait. Si nous jetons un coup d’œil sur l’évolution des émissions de GES de ce secteur entre 1990 et 2014, on découvre qu’elles ont augmenté de 90,4%, ce qui est énorme.

Si on compare cette augmentation à la hausse de GES du secteur des camions légers (VUS, minifourgonnettes et camionnettes : + 120,4%) on est en droit de se poser des questions, surtout quand on constate que le nombre de véhicules lourds a augmenté de seulement 34% entre 1990 et 2014 alors que le nombre de camions légers a augmenté de 202% durant la même période.1
L’augmentation des GES des véhicules lourds est donc tout aussi préoccupante que celles des camions légers, surtout si on considère que l’augmentation du nombre de véhicules lourds en circulation a été environ 6 fois moins importante que l’augmentation du nombre de camions légers en circulation sur les routes du Québec.
Les camions lourds sur nos routes
Alors que le nombre d’automobiles et de camions légers utilisés comme véhicules de promenade ou véhicules commerciaux sur les routes du Québec était de 5,050,504 en 20152, le nombre de camions et tracteurs routiers était de 138,207 (sur un total d’un peu plus de 150,000 véhicules lourds au total). Ainsi, il y avait 36 fois plus d’automobiles et de camions légers sur les routes du Québec que de camions et de tracteurs routiers.
Cependant, lorsqu’on regarde les émissions de GES des voitures et camions légers en 2014 (18,26 Mégatonnes d’équivalent CO2), on se rend compte qu’elles n’étaient que 2 fois plus élevées que celles des véhicules lourds3 (9,19 Mégatonnes d’équivalent CO2).4
 

 
De plus, si on jette un coup d’œil sur l’évolution de la consommation d’énergie5 du transport de promenade VS le transport commercial entre 1990 et 2013, on découvre une hausse de la consommation d’énergie de 63% pour le transport commercial (marchandise et voyageurs) VS une hausse de 15% pour les véhicules personnels… dont une hausse marquée depuis 2012.

 
C’est pourquoi il est urgent d’agir dans le secteur du camionnage lourd de marchandise pour diminuer nos GES et notre consommation de pétrole.
Le programme Écocamionnage6.
Vous ne le connaissez probablement pas et c’est normal puisque c’est un programme gouvernemental québécois qui ne s’adresse pas au grand public.
Selon le site web du programme :
« l’objectif du programme Écocamionnage est de favoriser l’utilisation d’équipements et de technologies visant à améliorer l’efficacité énergétique tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre dans le transport des marchandises.
Le programme vise plus spécifiquement l’industrie du transport des marchandises et des véhicules lourds. Il ne s’applique pas aux véhicules utilisés pour le transport des personnes.
Par ailleurs, la mise en œuvre de ce programme permettra de soutenir financièrement les entreprises qui réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre et, dans la plupart des cas, leur consommation de carburant.6 »
Ce programme est décliné en 4 volets qui donne droit à des divers appuis financiers:

  1. Homologation d’une technologie
  2. Démonstration d’une technologie
  3. Logistique
  4. Acquisition d’une technologie telle que :
  • antiralenti,
  • systèmes pour diminuer la consommation de carburant des unités auxiliaires (nacelles, etc)
  • Ordinateurs de bord
  • Aérodynamisme
  • Modules de contrôle
  • Véhicules hybrides et électriques
  • Véhicules au gaz naturel

Outre le fait qu’il a pour but de diminuer les GES en transport de marchandise, ce programme aide des entreprises québécoises comme Nordresa, Lion, etc qui oeuvrent à la fabrication de véhicules électriques de transport de marchandise et qui créent des emplois au Québec.

La relance du programme est annoncée… et repoussée depuis des mois
Or, ce programme lancé en février 2014 a été stoppé depuis mars 2017. Ainsi, depuis près de 7 mois, les officiels du ministère des transports disent aux entreprises concernées que ce programme sera relancé dans les prochaines semaines, ce qui commence à taper sérieusement sur les nerfs d’entrepreneurs qui comptent sur ce programme pour développer et vendre leurs produits et véhicules sans oublier les acheteurs de ces véhicules qui retardent leur achat en attendant la relance du programme.
Or, ce programme a contribué à diminuer les émissions de GES de l’industrie du camionnage de 200,000 tonnes à ce jour et rendu possible l’investissement de plus de $80 millions de la part de cette industrie dans la lutte aux GES selon les dires de Marc Cadieux, le PDG de l’association du camionnage du Québec.
D’ailleurs, à cause des délais qui se sont prolongés, plusieurs entreprises ont cessé d’attendre et se sont tournés vers l’achat de camions diésel.
L’arrêt de ce programme depuis près de 7 mois a donc favorisé la poursuite des achats de camions au diésel ou à essence et donc la hausse des GES… tout en ralentissant sérieusement le développement d’entreprises québécoises en électrification des transports de marchandise.
Si le gouvernement du Québec veut réellement aider les entrepreneurs québécois qui travaillent à l’électrification du transport de marchandises, ce programme doit être relancé au plus tôt.
La « transition » vers le gaz naturel doit être annulée
De plus, ce programme doit être revu car il subventionne le virage vers les camions au gaz naturel. Plutôt que d’appuyer la « transition » vers les camions au gaz naturel qui ne diminue pas les émissions de gaz à effet de serre et pérennise notre dépendance aux hydrocarbures, le gouvernement devrait plutôt se concentrer sur l’appui à l’électrification partielle ou complète de ces véhicules.

Sauf que le gouvernement du Québec supporte de toute évidence la transition vers les véhicules au gaz naturel… même si ça n’a aucun sens.
Des subventions pour les véhicules fabriqués hors Québec
Alors que le gouvernement du Québec juge nécessaire d’appuyer financièrement l’achat de véhicules légers électriques (voitures et camions légers) qui sont tous fabriqués hors du Québec, il est pour le moins préoccupant de constater qu’il « niaise » depuis des mois pour relancer le soutien financier pour l’achat de véhicules lourds électriques fabriqués au Québec.
Si vous trouvez que tout cela ne fait aucun sens, sachez que lorsque j’étais à la tête de l’équipe responsable de la stratégie d’électrification des transports, c’est nous qui avions appris aux fonctionnaires du ministère des transports que leur programme d’aide à la diminution des GES des camions lourds de l’époque (qu’ils évoquaient lorsque nous leur demandions ce que leur ministère avait en place pour faire face à ce défi)
… avait été arrêté 12 mois auparavant.
Je ne suis donc pas vraiment étonné… ou impressionné.
Et ce n’est certainement pas en changeant de ministre des transports 4 fois en 3 ans et demi que ça contribue à améliorer la situation.
1 : http://roulezelectrique.com/vehicules-legers-et-lourds-sur-nos-routes-des-chiffres-preoccupants/
2 : https://saaq.gouv.qc.ca/fileadmin/documents/publications/donnees-statistiques-2015.pdf
3 : La définition de « véhicule lourd » selon la SAAQ inclut tout véhicule routier dont le poids nominal brut est 4500 kilos et plus, ce qui inclut les autobus + minibus (approx 18,600 unités en 2015) et les dépanneuses (quelques centaines) en plus des camions et tracteurs routiers : https://saaq.gouv.qc.ca/transport-biens/vehicule-lourd/
4 : http://www.mddelcc.gouv.qc.ca/changements/ges/2014/Inventaire1990-2014.pdf
5 : http://energie.hec.ca/wp-content/uploads/2016/12/EEQ2017.pdf
6 : https://www.transports.gouv.qc.ca/fr/aide-finan/entreprises-camionnage/aide-ecocamionnage/Pages/aide-ecocamionnage.aspx

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