Photo : VÉ en chargement lors du Rassemblement écoélectrique qui a eu lieu dimanche dernier à Shawinigan.
Est-ce réaliste d’atteindre 100 000 voitures électriques en 2020 au Québec alors qu’il y en a environ 11 000 présentement (en septembre 2016)?
Les ventes de VÉ en 2014, 2015 et 2016
Tout d’abord regardons combien de véhicules électriques se sont vendus en 2014 et 2015 et extrapolons pour la fin 2016. Ça donne ceci.
La ligne horizontale rouge sur les barres de 2016 représente là où nous en étions au 31 juin 2016. Ces données sont comptabilisées sur le site de Fleetcarma pour 2014 (voir ICI), 2015 (voir ICI) et pour la première moitié de 2016 (voir ICI).
On voit sur la figure que le taux de croissance entre 2014 et 2015 a été de 65% alors qu’on devrait avoir autour de 53% entre 2015 et 2016. C’est donc un taux moyen de 59% sur les deux dernières années.
Un taux de croissance de 67 % est requis d’ici 2020
En partant de 13 000 véhicules électriques à la fin 2016, la question est donc : quel taux de croissance a-t-on besoin pour arriver à 100 000 véhicules électriques en 2020? Si on fait les calculs on trouve 67%, et les ventes annuelles devraient être celles qui sont illustrées sur le graphique ci-après.
On voit que ça exige des ventes importantes de près de 25 000 VÉ neufs en 2019 et près de 40 000 VÉ neufs vendus en 2020! N’oublions pas qu’on va vendre environ 4 500 VÉ en 2016 au Québec. C’est donc des grosses marches à monter.
Majorer le rabais à l’achat
C’est toutefois un défi qui peut être atteint si on prend les mesures pour y arriver. Nous avons vu avec le projet de Bruno Marcoux pour l’achat groupé de Leaf 100% électriques (voir ICI), cet été, qu’il y a eu 3 700 personnes qui se sont inscrites, en pensant qu’ils pourraient avoir un rabais supplémentaire de 3 000 $ à 5 000 $. C’est donc dire que quelques milliers de dollars de plus en incitatif devraient avoir un impact important.
On sait que ça fonctionne en Californie, qui offre 2 500 $ de rabais supplémentaire à celui de 7 500 $ du gouvernement fédéral étatsunien pour les voitures 100% électriques, et 1 500 $ de plus pour les véhicules hybrides rechargeables. Les ventes de VÉ s’y portent très bien, aidées également par une loi zéro émission (j’y reviendrai dans un autre billet).
On a également vu cette année nos voisins à l’Ouest, l’Ontario, mettre en place une majoration de leur rabais sur l’achat d’un VÉ. Ce rabais, qui variait de 5 000 $ à 8 500 $ passe désormais à une fourchette de 6 000 $ à 10 000 $ auquel s’ajoute 3 000 $ pour les plus grosses batteries et 1 000 $ pour les véhicules ayant 5 sièges et plus. La Chevrolet Bolt (383 km d’autonomie, batterie de 60 kWh) aura donc droit à 14 000 $ de rabais en Ontario.
Sans aller jusque là, pour atteindre notre objectif de 100 000 VÉ en 2020 au Québec, il va falloir donner une autre impulsion significative. Je propose qu’on augmente le rabais à 10 000 $ pour les voitures 100 % électriques avec une batterie de 30 kWh à 45 kWh (160 km à 240 km d’autonomie) et à 12 000 $ pour les plus grosses batteries (>45 kWh). Une voiture hybride rechargeable comme la Volt avec une batteries de 12 kWh à 18 kWh devrait avoir un rabais de l’ordre de 9000 $, et pour les batteries > 18 kWh un rabais de 10 500 $.
Bien sur, le rabais devrait être maintenu jusqu’en 2020, et décroître graduellement par la suite, sur 3 ans (75%, 50% et 25% avant d’arriver à zéro).
Comment financer le tout
Puisqu’on va avoir 13 000 VÉ sur les routes à la fin 2016, il restera à donner des rabais pour 87 000 VÉ si on veut en avoir 100 000 (100% électrique et hybride rechargeable) en 2020. En prenant une moyenne de 9 000 $ par VÉ ça représente une somme de 783 millions $ à investir dans les 4 prochaines années.
Idéalement, il commencerait à être temps que le Fédéral investisse à son tour. C’est le gouvernement canadien qui devrait financer ce supplément au rabais.
Que ce soit le fédéral ou le provincial, il faut savoir qu’il s’est consommé au Québec 13,9 milliards de litres de carburants en 2013, selon le Ministère des Ressources naturelles (voir ICI). En ajoutant 1¢ de taxe par litre de carburant à chaque année jusqu’en 2020, on paierait 4¢ de plus notre essence en 2020. En comptant le 1¢ en 2017, le 2 ¢ en 2018 et le 3¢ en 2019 en plus du 4 ¢ de 2020, ça ferait rentrer 10 ¢ multiplié par 13,9 milliards de litres soit 1,39 milliards $. Il y en aurait donc bien assez pour les bornes de recharge également.
C’est juste une question de volonté politique.
On a donné bien plus aux pétrolières
Et ceux qui se plaignent que cela n’a pas de sens que l’État finance les véhicules électriques, n’oubliez pas que le gouvernement canadien finance les pétrolières et gazières à la hauteur de 1,3 milliards $ selon l’International Institute for Sustainable development (voir ICI), ce qui représente une cote part pour le Québec de 300 millions $ par année, soit 1,2 G$ pour les quatre prochaines années. Et ça c’est sans compter les trente dernières années.
Sans compter que les VÉ financés vont faire économiser de 10 000 $ à 15 000 $ en carburant sur la vie des véhicules. C’est du pétrole de moins acheté à l’étranger et c’est de l’argent qui reste dans notre économie.
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