Bien que n’émettant que de la vapeur d’eau comme résidus, la pile à hydrogène est aussi propre que la source qui permet de produire l’hydrogène. Selon l’Automotive Fuel Cell Cooperation, des études faisant l’analyse des émissions de gaz à effet de serre ( GES ) de la production du combustible jusqu’à sa consommation finale dans un véhicule ( du puit à la roue – Well-to-wheel ) auraient démontré qu’elles seraient 55% inférieures à celles d’une voiture à moteur à combustion interne à essence et de 40% inférieures à celles d’un véhicule hybride lorsque l’hydrogène est produite en utilisant du gaz naturel. Des chiffres avec lesquels le physicien Pierre Langlois est en désaccord.
Selon lui, le bilan d’émission de GES de la pile à combustible à hydrogène serait même pire que celui des voitures à essence conventionnelles. Il base son analyse sur les données contenues dans le graphique ci-bas, entre-autres, que l’on peut trouver dans le document intitulé “Well-to-Wheels Greenhouse Gas Emissions and Petroleum Use for Mid Size Light-Duty Vehicles“, produit par le Département de l’Énergie des États-Unis, en 2010.
Voici son analyse:
On peut y constater qu’une voiture intermédiaire à PAC dont l’hydrogène est produit à partir de gaz naturel émet 200 g CO2/mile, alors qu’une voiture hybride diesel en émet 220 g CO2/mile, et qu’une voiture hybride au gaz naturel (moteur thermique) n’en émet que 185 g CO2/mile. Cette dernière émet donc moins de CO2 qu’une voiture à PAC-H2.
Mais de toute façon, ce modèle ne tient pas compte des fuites de méthane ( NDLR: au niveau des puits lors de l’extraction du gaz naturel ainsi que du système de distribution par gazoduc ) beaucoup plus élevées (plus du double de ce qu’on supposait avant) qu’on a mesuré en 2012. Ce 4% à 9% de fuites devant être multiplié par 25 pour tenir compte du potentiel de réchauffement climatique du méthane vs celui du CO2 fait plus que doubler les émissions de 200 g CO2/mile des voitures à PAC-H2, ce qui entraine que ces voitures vont dépasser les émissions des voitures à essence d’aujourd’hui !!!
Passons maintenant à son commentaire à propos de la nouvelle concernant l’annonce de Volkswagen de ne pas désirer se lancer dans l’aventure des voitures alimentées par une pile à combustible.
Dans le cadre d’une entente nouée avec le physicien Pierre Langlois , Éco-Énergie à Montréal et Roulezelectrique ont obtenu le privilège de vous présenter le contenu intégral des infolettres qu’il publie sur une base régulière. Mentionnons que Pierre Langlois est consultant en mobilité durable, auteur et conférencier. Il est d’ailleurs l’auteur du livre Rouler Sans Pétrole, publié aux Éditions MultiMondes. On a pu l’apercevoir au petit écran dans des reportages consacrés aux hybrides rechargeables et aux batteries et voitures électriques, à l’émission Découverte, entre autres, où il a témoigné en tant qu’expert. Un gros merci à lui.
Voici:
Le président de Volkswagen dénonce l’hydrogène pour les voitures
Bonjour à tous
Récemment on a eu plusieurs annonces de différentes compagnies automobiles ou d’alliances de compagnies qui nous disent qu’elles ont l’intention de mettre en marché des voitures à piles à combustible (PAC) utilisant de l’hydrogène, à l’horizon 2015-2017.
Voir, par exemple, l’article de MIT Technology Review, en date du 28 janvier 2013: Ford, Daimler, and Nissan Commit to Fuel Cells
Il y a un bout de temps qu’on n’avait pas entendu parler des voitures à PAC-hydrogène. Pour ceux qui ne connaissent pas cette technologie, c’est comme une voiture électrique à batterie, sauf qu’on remplace la batterie par une PAC (sans parties mobiles), qui produit de l’électricité en combinant l’hydrogène à l’oxygène de l’air, sans qu’il y ait une combustion proprement dite. De la vapeur d’eau sort au bout du tuyau d’échappement. On peut faire le plein d’hydrogène (gaz sous haute pression) en 10 minutes et parcourir environ 500 km, sans que la voiture n’émette de pollution ni de gaz à effet de serre.
Or, cette semaine, on apprenait que le président de Volkswagen, M. Winterkorn, n’a pas l’intention de se lancer dans l’aventure des voitures à PAC-hydrogène, pour des raisons sérieuses qui sont pourtant bien connues: le coût élevé des véhicules, le coût élevé de l’hydrogène et la nécessité d’implanter une nouvelle infrastructure de distribution de l’hydrogène. Winterkorn continue en déclarant que les voitures hybrides branchables ont bien plus de potentiel, ou même les voitures au gaz naturel.
Voir l’article de Automotive News: VW CEO Winterkorn pans hydrogen fuel cells
En fait, il y a bien d’autres raisons qui font que la filière hydrogène va à l’encontre du développement durable, dont, en particulier, le fait qu’il faille dépenser plus d’énergie pour produire l’hydrogène qu’il n’en fournit pour faire avancer un véhicule. De plus, il n’y a aucun gain concernant les gaz à effet de serre (GES), car 96 % de l’hydrogène est produit à partir de carburants fossiles présentement (principalement à partir du gaz naturel), et la production de GES est simplement déplacée à l’usine de production d’hydrogène. Une Prius n’émet pas plus de GES qu’une voiture à PAC-hydrogène, en considérant le cycle de vie des carburants (hydrogène ou essence) du puits aux roues du véhicule. Surtout qu’en 2012 la National Oceanis and Atmospheric Administration (NOAA) a publié des mesures de fuites de méthane bien supérieures à ce qu’on estimait auparavant pour l’industrie du gaz naturel. Les chercheurs du NOAA trouvent jusqu’à 9 % de fuites dans certains champs!!!
Voir : Air sampling reveals high emissions from gas field et Methane leaks erode green credentials of natural gas
Or, le méthane, qui est le principal constituant du gaz naturel, est 25 fois plus actif que le CO2 pour le réchauffement climatique! C’est ce qui fait dire à plusieurs scientifiques que le gaz naturel est pire que le charbon sous l’aspect des GES, même si sa combustion en émet environ 50 % de moins. Il faut regarder le cycle de vie, pas seulement la combustion.
Bon, j’en vois, dont le directeur de l’Institut de recherche sur l’hydrogène à Trois-Rivière (je l’ai entendu à l’émission radiophonique «Les années lumière» de Radio-Canada), qui vont dire qu’au Québec on peut produire de l’hydrogène sans produire de gaz à effet de serre, en utilisant notre énergie renouvelable pour faire l’électrolyse de l’eau.
C’est vrai, mais ce qu’ils oublient (ou omettent de dire) c’est que cette façon de faire consomme 3 fois plus d’électricité pour faire avancer un véhicule à PAC-hydrogène, qu’il en serait requis pour faire rouler un véhicule électrique à batterie, ou un véhicule hybride branchable (en mode électrique) de même poids et performances. Dépenser 3 fois plus d’énergie pour faire la même chose ce n’est pas du développement durable.
C’est beaucoup plus efficace d’envoyer directement l’électricité dans la batterie d’un véhicule, que de la transformer en hydrogène par électrolyse, transporter l’hydrogène gazeux aux stations et reconvertir l’hydrogène en électricité dans la PAC de la voiture. C’est ce que j’ai illustré dans mon livre «Rouler sans pétrole» avec la figure suivante du chapitre 3 consacré au non-sens de l’hydrogène dans les transports routiers. Et je ne suis pas le seul à le dire. Vous trouverez une multitude de références dans le livre.
Définitivement, je suis tout à fait d’accord avec le président de Volkswagen, la meilleure solution pour les 20 prochaines années est la voiture hybride branchable, qui fera 80% de ses km à l’électricité et pourra faire le plein de carburant en 5 minutes dans toutes les stations déjà existantes, pour les longs trajets occasionnels. N’oublions pas que l’hydrogène c’est du gaz naturel déguisé.
C’est aberrant de voir à quel point les lobbies peuvent souvent être à l’encontre du gros bon sens, et de l’intérêt de la population!
Bien cordialement
Pierre Langlois, Ph.D., physicien
Consultant en mobilité durable,
Auteur et conférencier
Téléphone : 418-875-0380
Courriel: pierrel@coopcscf.com
Site Internet: www.planglois.com