Nissan LEAF de Al Sorhaindo raccordée à une BRCC du Circuit électrique.
Voici un témoignage très détaillé de Al Sorhaindo sur les mesures à prendre pour réduire la dégradation des batteries de VÉ en raison de la chaleur. Vous y lirez plusieurs trucs que vous pourrez mettre en pratique afin d’éviter que la température de la batterie ne vienne trop élevée.
Merci Al!
PS : Al a parcouru 104 000 km électriques jusqu’à maintenant!
____________________________________________________________________________________________________________________
La durée de vie d’une batterie lithium-ion varie selon plusieurs facteurs, dont le temps, le niveau de charge, la température et le nombre de cycles de recharge et de décharge. En ces temps de canicule, parlons des moyens d’éviter la perte accélérée de capacité de la batterie en raison de la chaleur.
À partir d’un certain seuil de température, toutes les batteries lithium-ion s’usent plus rapidement. Le seuil varie énormément selon la chimie de base de la batterie. Par exemple (chiffres très approximatifs), cela pourrait être 40 °C pour LiNiCoAlO2 (Tesla Model S) ou 30 °C pour LiMn2O4 (LEAF et Volt). Une fois que le seuil est dépassé, le taux de perte s’accélère quand la température grimpe. Autrement dit, deux heures à 35 °C et huit heures à 25 °C pourraient être aussi néfastes pour la batterie d’une LEAF 2011 que 10 dix heures à 30 °C.
Qu’est-ce que les manufacturiers font pour contrer ce problème? D’abord, ils peuvent choisir une des chimies de batterie moins sensibles à la chaleur. De plus, pour la chimie de base sélectionnée, on peut hausser la résistance à la chaleur en modifiant l’électrolyte qui conduit le courant des ions lithium (LEAF 2013-2015) et en améliorant le séparateur entre la cathode et l’anode de la batterie (LEAF 2015). Vous avez bien compris que Nissan n’a pris aucune de ces mesures pour la LEAF 2011-2012. Ensuite, pour empêcher encore plus le réchauffement, les fabricants limitent certaines fonctionnalités quand la batterie est déjà très chaude. Par exemple, la puissance maximale de la recharge et du moteur est restreinte une fois qu’on dépasse un certain seuil.
Enfin, les manufacturiers tentent de refroidir les batteries. Chaque VÉ est muni d’un système de refroidissement, mais dont le type et l’efficacité diffèrent :
1) Air passif — Médiocre. En partant, l’air absorbe la chaleur 25 fois moins vite que l’eau, puis ce moyen dépend du vent et de la température de l’air. Dans les moteurs d’avion, c’est efficace, car il fait frais à 6 000-12 000 mètres d’altitude, et l’air passe par les moteurs à haute vitesse lors du vol. Pourtant, c’est quasiment inutile pour la batterie d’une LEAF immobilisée pendant une journée chaude et sans vent.
2) Air actif — Meilleur. Ce moyen crée son propre vent, mais peut demeurer assez inefficace quand il fait chaud, sauf si l’air est climatisé. Dans le cas de la i-MiEV, le ventilateur souffle normalement l’air ambient, mais lors des recharges rapides, le climatiseur du véhicule prête main-forte.
3) Liquide actif — Le meilleur. Entre autres, on trouve ce type de système dans la Tesla Model S et la Chevrolet Volt.
Qu’est-ce que les conducteurs peuvent faire, eux, pour protéger leur batterie contre l’usure prématurée en raison de la chaleur? D’abord, il faut identifier les sources potentielles de réchauffement. Pour une LEAF au Québec, voici les sources en ordre d’importance selon mes observations :
1) La recharge rapide (CHAdeMO).
2) La conduite tirant > 20 kW (normalement sur l’autoroute).
3) La température ambiante.
4) La recharge non rapide.
5) Les rayons de soleil.
6) L’asphalte surchauffé.
7) La conduite en général (< 20 kW).
8) La recharge de la batterie à plus de 80 %.
9) La décharge de la batterie à moins de 20 %.
Pour une voiture qui est toujours garée au soleil, les sources #5 et #6 pourraient grimper en importance. D’ailleurs, la température ambiante, le soleil et l’asphalte font partie des dangers principaux pour les VÉ dotés d’un système de refroidissement liquide. Pendant la recharge et la conduite, le système de refroidissement travaille, mais il se désactive normalement quand une voiture est stationnée et pas en recharge.
Ensuite, il faut minimiser le temps exposé à ces sources, surtout quand plusieurs de ces conditions agissent en même temps pour réchauffer la batterie.
1) Réduire le temps de recharge rapide. Brancher plutôt sur le niveau deux quand vous n’êtes pas pressé. Favoriser plusieurs courtes sessions de recharge rapide au lieu d’un ou deux cycles de longue recharge et décharge.
2) Roulez moins vite. D’abord, il est bien connu que l’autonomie augmente quand on roule plus doucement et, par le fait même, la durée de recharge nécessaire aux bornes rapides est réduite. De plus, moins de chaleur est emmagasinée dans la batterie lorsqu’on roule doucement. De fait, le taux de création de la chaleur est au cube de la vitesse pour un VÉ. Grâce à LEAF Spy Pro, j’ai observé une fois que le moteur de ma LEAF prenait 22,5 kW à 110 km/h, mais 19 kW à 100 km/h. Est-ce que cela veut dire que la batterie réchauffait 18,4 % (22,5/18) plus vite? Oui, la puissance fournie par la batterie a augmenté de 18,4 %. Malheureusement, le formule pour la puissance est P = VA, où la tension en volts demeure constante selon le niveau de charge de la batterie. Donc, augmenter la puissance par 18,4 % se traduit par une hausse du courant en ampères, A, par 18,4 %. Là où cela se gâte, c’est que la formule pour la chaleur dégagée en faisant passer un courant par une résistance est proportionnelle au carré de l’intensité du courant P = R x I2 (Google l’effet Joule pour plus d’infos). Puisque 1,184 x 1,184 = 1,40, pas moins de 40 % de plus de chaleur par minute se créait dans la batterie à 110 km/h qu’à 100 km/h! (L’écart entre 90 km/h et 118 km/h est de plus de 100 %).
3) Quand c’est possible, par exemple pour des courses non urgentes, conduire le soir ou le matin au lieu du midi.
4) Garer à l’ombre. Cela peut impliquer un déplacement de l’auto du côté ouest au côté est du bâtiment à midi.
5) Profiter de la baisse de température la nuit. Si vous avez un garage, vous avez un gros avantage le jour pour mettre l’auto à l’abri de la chaleur et du soleil. Pourtant, la nuit, il peut faire plus frais et venteux dehors.
6) Ne pas recharger à plus de 80 % quand il fait chaud, surtout aux bornes rapides. La hausse de température lors de la recharge s’accélère de façon importante au fur et à mesure que la batterie se rapproche de 100 % de sa capacité. De plus, pour la même température chaude, la perte de capacité semble s’accélérer quand la batterie est presque pleine.
7) Ne pas décharger la batterie en bas de 20 %. Quand la batterie se décharge, la tension baisse. Comme P = VA, le courant doit donc augmenter pour fournir la même puissance au moteur. Puisque la chaleur perdue dans la batterie dépend du courant, plus que le niveau de charge baisse, plus la batterie réchauffe.
8) Prendre soin de ne pas stationner sur l’asphalte surchauffé. À l’été, l’asphalte au soleil peut atteindre la température de 50 °C. De quoi griller une batterie, surtout que cette dernière se trouve le plus souvent en-dessous du plancher du véhicule. Si vous ne pouvez pas trouver un coin à l’ombre dans un grand stationnement, favoriser un espace qui vient d’être libéré à un emplacement exposé depuis longtemps au soleil.
Voici un exemple fictif lors de la canicule : LEAF A et LEAF B font le trajet Montréal-Québec. Il fait 30 °C le jour avec un soleil de plomb et 15 °C la nuit. Les deux batteries des véhicules sont à 20 °C pour commencer.
La veille, LEAF A passe la journée à l’ombre. Pourtant, à cause de la chaleur, la température de la batterie grimpe quand même à 27 °C. Comme il fait frais la nuit, cela baisse encore à 20 °C avant le départ, malgré une recharge sur une borne de niveau 2. Entretemps, la LEAF B demeure au soleil et sa batterie termine la journée à 30 °C. Puis, cela ne baisse qu’à 25 °C la nuit en raison de l’environnement moins frais de son garage.
Les deux LEAF partent de Montréal rechargées à 100 %. LEAF A roule à 100 km/h. Il lui faut ajouter 120 % à la capacité de sa batterie pour arriver au bon port, se traduisant à deux recharges rapides de 25 minutes de 20 % à 80 %. En arrivant à Québec, la batterie de la voiture affiche 34 °C. LEAF B roule à 110 km/h. Elle a besoin d’ajouter 145 % à la capacité de la batterie, nécessitant une recharge rapide supplémentaire de 15 minutes en plus des deux effectuées par la LEAF A. En partant à une température plus chaude, en fournissant plus de puissance au moteur et en passant plus de temps sur la recharge rapide, la batterie de la LEAF B atteint les 42 °C, impliquant plusieurs fois plus de pertes en raison de la chaleur que dans le cas de LEAF A.
Q : Le climat au Québec est froid, ai-je à m’inquiéter de tout cela?
R : Il est vrai qu’on est chanceux au Québec. La température douce est bénéfique pour les batteries. Pourtant, l’été, la recharge rapide et d’autres facteurs combinés peuvent être néfastes pour une batterie, surtout dans les modèles qui ne sont pas dotés d’un système de refroidissement liquide.
Q : Je ne veux pas me casser la tête ou faire de compromis. Est-ce que la batterie de ma voiture est à risque?
R : Il est possible de prendre quelques mesures de précaution à l’été au Québec pour protéger la batterie sans faire de gros compromis pour autant. Ceci dit, si vous avez une voiture comme la Volt qui ne fait pas de recharge rapide et qui bénéfice d’un système de refroidissement liquide, vous n’avez aucun souci à vous faire. À l’autre extrême, on conseille au propriétaire d’une LEAF 2011 de faire attention s’il fait souvent des recharges rapides.
Q : J’ai une belle nouvelle Soul EV de luxe qui se recharge très rapidement aux bornes CHAdeMO. La chaleur générée lors de ces recharges est-elle dissipée efficacement ou est-ce que la chimie de la batterie résiste bien à la chaleur?
R : Je ne connais malheureusement pas le comportement de la Soul EV et de beaucoup d’autres VÉ face à la chaleur. Pour les quelques modèles que je connais, la LEAF 2011-2012 est la pire, mais Nissan a effectué quelques améliorations en 2013-2014 et encore en 2015. La Volt et la Tesla Model S sont moins à risque que toutes les LEAF, cependant, grâce aux systèmes de refroidissement à liquide actifs.
Q : D’où viennent ces renseignements?
R : J’ai trouvé des informations un peu partout sur Internet. (Dieu sait que c’est la source la plus fiable au monde). Je tiens à remercier François Boucher et de nombreux participants sur roulezelectrique, aveq, mynissanleaf, etc. pour leur contribution. Voici deux liens, en particulier, pour en savoir plus sur le sujet :
http://www.electricvehiclewiki.com/Battery_Capacity_Loss
https://www.youtube.com/watch?v=9qi03QawZEk