Batterie

Les batteries sodium-ion (Na-ion) s’en viennent

Les véhicules électriques et le stockage pour les énergies renouvelables vont demander des quantités colossales de matières premières qui composent les batteries. Présentement presque toutes celles qui sont utilisées ou qu’on prévoit utiliser pour ces applications sont des batteries Li-ion. Toutefois, le lithium est une ressource limitée que l’on ne retrouve en abondance que dans quelques pays, principalement au Chili, en Argentine, en Bolivie, en Australie et en Chine. Le prix du lithium risque donc de monter en flèche lorsque la demande va s’approcher de son paroxysme.

Conscients de cette problématique, les chercheurs s’activent depuis quelques années à mettre au point des batteries sodium-ion, qui offrent autant de potentiel que les batteries Li-ion, si on arrive à augmenter suffisamment le nombre de cycles de recharge. Le sodium est un métal alcalin léger, comme le lithium, mais son abondance sur terre est environ 50 fois plus élevée que celle du lithium. Le sel de table est composé de sodium (et de chlore). Il y en a donc en abondance dans nos océans, et les mines de sel, à ciel ouvert ou souterraines, sont très nombreuses et réparties dans un très grand nombre de pays.

Un gros problème des batteries Na-ion est la formation de dendrites, des excroissances en forme d’aiguilles qui poussent sur l’anode de la batterie et se rendent à la cathode, établissant ainsi un court-circuit entre les deux électrodes, ce qui détruit la batterie au bout de quelques centaines de cycles de recharge à peine.

Les efforts pour régler ce problème et optimiser la chimie ont été couronnés de succès en novembre 2015, lorsque des chercheurs du CNRS et du CEA, en France, ont présenté la batterie Na-ion qu’ils ont pris deux ans seulement à développer, et qui affiche des performances remarquables. Inutile de dire que ces institutions de recherche sont très réputées. Ils ont produit des batteries cylindriques au format 18650, le même format qui est utilisé dans les ordinateurs et la Tesla Model S ou la Tesla Model X.

De plus, cette batterie Na-ion a été produite avec les mêmes équipements que ceux utilisés pour fabriquer les batteries Li-ion, ce qui laisse présager une commercialisation relativement rapide. Une vidéo YouTube décrit la démarche.

Essentiellement, la densité d’énergie obtenue est de 90 Wh/kg, ce qui avoisine la densité des batteries Li-ion au phosphate de fer développées à l’IREQ. Mais, cette densité pourra progresser à peut-être 130-140 Wh/kg. Par ailleurs, le nombre de cycles de recharge atteint 2 000, ce qui est sensiblement la même chose que les batteries Li-ion. Notons que les batteries Li-ion NAC utilisées par Tesla atteignent 250 Wh/kg, alors que les batteries Li-ion NMC utilisées par la plupart des autres fabricants ont une densité d’énergie de l’ordre de 180 Wh/kg. Et, un avantage majeur des batteries Na-ion serait leur coût plus faible que celui des batteries Li-ion, dû aux matériaux plus abondants et moins chers. Enfin, la stabilité thermique des batteries Na-ion serait meilleure ce qui renforce l’aspect sécuritaire.

Présentement, deux jeunes compagnies en démarrage ont des prototypes de batterie Na-ion qu’elles aimeraient bien commercialiser. Il s’agit de BroadBit en Finlande et de Faradion au Royaume-Uni. Ces compagnies ne donnent pas beaucoup de détails. Faradion mentionne que leur batterie a une densité d’énergie similaire aux batteries Li-ion et peut être rechargée 400 fois. Broadbit parle pour leur batterie Na-ion d’une densité d’énergie supérieure à 1,5 fois celle des batteries Li-ion et d’un nombre de recharges supérieur également, sans spécifier. Ils prétendent que le coût pourrait être au moins 30 % moins cher. Ce sont là des indications intéressantes qui restent à être validées en production de masse.

Une autre percée a été accomplie récemment (février 2017) pour les batteries Na-ion, dans le laboratoire du professeur Goodenough de l’Université du Texas. N’oublions pas que ce dernier est le co-inventeur de la batterie Li-ion sur laquelle il a travaillé dans les années 1980. C’est également lui et son équipe qui ont inventé la batterie Li-ion au phosphate de fer qui a été beaucoup améliorée par les chercheurs de l’Institut de recherche d’Hydro-Québec (IREQ). C’est donc une source très crédible.

Dans leur communiqué de presse, on y apprend que la nouvelle batterie est entièrement solide (pas d’électrolyte liquide) et que l’électrolyte est une mince plaque de verre qui conduit très bien les ions, tellement bien qu’on n’a pas besoin de chauffer la batterie comme les autres batteries solides qui fonctionnent à plus de 60 °C. Celle du professeur Goodenough et son équipe peut opérer à -20 °C. Ne serait-ce que ça, c’est une première mondiale, du jamais vu.

Cette batterie unique a bien d’autres avantages. Elle pourrait stocker au moins 3 fois plus d’énergie électrique que les batteries Li-ion d’aujourd’hui pour un même poids, tout en étant plus sécuritaire, du fait de l’absence d’électrolytes liquides inflammables! Le poids plus faible de cette batterie révolutionnaire tient à l’utilisation de lithium métallique, qui normalement avec les électrolytes liquides cause des dendrites, dont nous avons parlé plus haut. Mais, l’électrolyte de verre élimine ce problème et favorise un grand nombre de cycles de recharge. Ils en sont à plus de 1200 cycles dans leurs tests, avec peu de dégradation, et croient que le nombre de cycles de recharge de ce type de batterie solide va être supérieur à celui des batteries Li-ion conventionnelles. Autre avantage, une recharge très rapide, en quelques minutes.

Et, la cerise sur le gâteau c’est que cette batterie peut tout aussi bien fonctionner avec du sodium métallique, ouvrant toute grande la porte aux batteries Na-ion à plus grande capacité que les batteries Li-ion. Par ailleurs, la très grande abondance du sodium laisse envisager des coûts de production inférieurs. Sans compter qu’aucun élément chimique néfaste pour l’environnement n’est utilisé, selon le communiqué de presse, ce qui incite à penser qu’il n’y a pas de cobalt, un élément chimique toxique très rare, entrainant une montée rapide de son coût, qui a doublé de novembre 2016 à mars 2017.

Cette annonce apporte beaucoup d’espoir, mais il est difficile de dire si les petites batteries de forme bouton qu’ils ont testées dans leur laboratoire pourront bien se prêter à une production de masse dans des plus grands formats, et, si oui, dans combien d’années?

En conclusion, une chose est sure, les éléments sont en place pour favoriser l’entrée sur le marché des batteries Na-ion d’ici quelques années.


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