Pollution atmosphériqueVoitures électriques

La santé et l’environnement selon le Dr François Reeves (1re partie de 3)

Ce texte rédigé par le Dr. François Reeves a été publié dans le livre “L’auto électrique… et plus!” paru en 2018. Il demeure parfaitement d’actualité.

Voici donc la première partie de 3.

Avec les yeux du cœur

Sensible aux impacts de l’environnement sur le cœur, le cardiologue que je suis ne peut que saluer le vaste mouvement vers une énergie propre qu’entraîne l’électrification des transports. Cet élan est si bien engagé que d’ici peu, on pourrait bien regarder les « chars à boucane » comme les locomotives au charbon. Rappelons-nous que l’iPhone n’existait pas il y a 10 ans… Et le plus beau : la veille des longs congés, Hydro-Québec n’impose pas une hausse inexpliquée du coût de l’électricité, contrairement aux facétieuses pétrolières qui jouent à ce petit jeu (catch me if you can…) chaque long week-end.

Un vieil adage médical dit qu’on ne veut pas être le premier ni le dernier à essayer un médicament. C’est la prudence devant l’innovation. Propriétaire d’un véhicule électrique depuis près de deux ans, je ne reviendrais jamais en arrière, sauf en cas d’échec commercial.

Tous les constructeurs automobiles s’impliquent aujourd’hui dans l’électrification des motorisations. Tout comme nous avons vu disparaître l’essence au plomb, disparition qui s’est accompagnée d’énormes gains en santé publique, peut-être verrons-nous disparaître l’essence tout court, au bénéfice de tous.

De fait, si tous les moteurs à essence étaient remplacés d’un coup de baguette magique par des moteurs électriques, les villes seraient métamorphosées : monumentale réduction des polluants et du bruit – deux nuisances urbaines bien caractérisées –, et baisse des infarctus, des AVC et de la mortalité. En prime, nous pourrions atteindre l’objectif du Québec de réduire de 37,5 % les GES d’ici 2030, un engagement important.

Ce sont ces aspects que je vais étoffer avec les yeux du cœur.

Électrique pour tous

La critique la plus virulente à propos de l’auto électrique est venue de ma fille, férue de justice sociale : « Papa, c’est une solution de gens riches!» Ce à quoi je lui ai répondu: «Les premières baignoires, c’étaient les riches qui les avaient. Les premiers téléphones, les premières télés, les premiers ordinateurs, les premiers iPhone, c’étaient encore les riches qui les avaient. Mais cela a permis de paver la voie à des technologies aujourd’hui disponibles pour tous. Et ces voitures électriques coûtent maintenant grosso modo le même prix que les voitures à essence. Et cela n’empêche pas les autres solutions, les transports en commun, le covoiturage, le vélo, etc. Les véhicules électriques font partie des solutions à la crise de santé publique et environnementale due aux combustibles fossiles. »

La voiture vue par Darwin : du cheval-vapeur au kilowattheure 

Prenons du recul et observons l’humanité comme si nous étions des extraterrestres en mission sur Terre et capables de remonter le temps pour observer l’évolution.

L’homme moderne, Homo sapiens, est une jeune espèce. Nous avons environ 200 000 ans. Ce n’est rien comparativement aux tortues qui existent depuis 400 millions d’années. En tant qu’espèce, nous sommes encore dans l’enfance de notre évolution. L’humain est successivement passé de la « sauvagerie » animale (Cro-Magnon et Neandertal) à un monde tyrannisé (César, Hitler et autres Staline), puis au monde dit civilisé où la plume est généralement plus forte que le glaive.

L’être humain est en perpétuelle évolution vers une meilleure qualité de vie.

Les transports sont une vibrante démonstration de cette évolution. Dès la préhistoire, le cheval décuplait nos possibilités. Posséder un cheval améliorait considérablement la vie de son propriétaire et de sa communauté. Le cheval moderne, notre voiture, est un aboutissement majeur de la révolution industrielle amorcée à la fin du XVIIIe siècle par James Watt en Écosse. Watt a inventé le premier moteur à combustion : brûler du charbon pour faire bouillir de l’eau qui actionne une machine à vapeur.

C’était parti pour une nouvelle ère de l’humanité, l’Anthropocène, caractérisée par le brûlage intense de fossiles comme source d’énergie. Plus de deux cents ans après le premier moteur de James Watt, le moteur à combustion atteint son apogée avec des voitures de rêve, hyperpuissantes, certaines atteignant 1000 chevaux. Notre cheval se multiplie par mille.

Pourquoi électrifier les transports ?

1) Santé : la pollution est responsable
de 9 millions de décès en 2015
La pollution atmosphérique cause plus de décès que toutes les guerres actuelles, ainsi que le SIDA, le Zika, l’Ebola et la malaria réunis !

L’énergie que nous utilisons et qui est essentielle à notre qualité de vie est basée principalement sur les combustibles fossiles depuis le début de la révolution industrielle. En 1850, il y avait peu de combustibles fossiles, peu de pollution ; le taux de CO2 était de 240 ppm1 ; l’air était relativement propre et le taux d’infarctus, plutôt bas.

En 1948, crise de santé publique aux États- Unis : un quinquagénaire sur trois faisait une crise cardiaque, soit 400 % de plus qu’au début du XXe siècle. C’est ce qui a motivé la célèbre étude Framingham (d’après le nom d’une petite ville du Massachusetts, près de Boston) que tous les médecins connaissent et qui a déterminé nos grandes connaissances sur la maladie cardiaque. Or, on se rend compte aujourd’hui que le taux de pollution aux États- Unis était à son maximum au même moment que le pic d’infarctus. On a ensuite démontré que plus un milieu est pollué, plus la mortalité (en particulier cardiovasculaire) augmente. L’environnement joue donc un rôle très important dans la survenue de nos maladies et décès. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) considère la pollution atmosphérique comme le tueur numéro un de la planète : on lui attribuait 7 millions de décès en 2012, soit 1 sur 6 dans le monde, dont 80 % par mortalité cardiovasculaire. C’est pourquoi le cardiologue que je suis s’intéresse à la pollution.

Malheureusement, la situation ne s’améliore pas. La Lancet Commission on Health and Climate (commission sur le climat et la santé qui regroupe des centaines de chercheurs en environnement de tous les continents) évaluait à 9 millions le nombre de décès prématurés causés par la pollution de l’air en 2015.

Au Canada, pays pourtant beaucoup moins pollué que la Chine et l’Inde, l’Institut international du développement durable (IISD) a démontré que la pollution atmosphérique a entraîné des dépenses en santé et en invalidité de 36 milliards de dollars en 2015. Ces résultats, qu’on croit même en deçà de la réalité, ont été avalisés par le Conference Board du Canada. D’autres études montrent que, chaque année au Canada, la pollution atmosphérique cause 20 000 décès excédentaires.

À l’inverse, partout où l’on a mesuré une diminution de la pollution, on observe une baisse des infarctus et des AVC. La diminution des hospitalisations atteint la même amplitude que celle constatée avec la baisse du tabagisme. Ce qui est logique : dans les deux cas, on a contrôlé les fumées primaire et secondaire, et on a amélioré la qualité de l’air.

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