Le bagage de connaissances de Daniel sur l’électrification des transports est tel qu’il est incommensurable! Daniel se consacre désormais aux «3E» : Énergie, Environnement et Électrification des transports! Bienvenue dans la communauté de Roulez Électrique, Daniel!
Sylvain Juteau
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Par Daniel Breton
Pendant qu’on parle de transport électrique, le parc automobile ne cesse de grossir. En effet, selon les données de la SAAQ, le nombre de véhicules en circulation au Québec est passé entre 1990 et 2010 de 3 965 000 véhicules à 5 914 000, ce qui représente une augmentation de 49 % en 20 ans!
Durant la même période, la population du Québec a augmenté d’environ 10 %. Le parc de véhicules a donc augmenté 5 fois plus que la population.
De ce total, les voitures et camions légers représentent 80 % du parc de véhicules alors que les camions, tracteurs routiers et autobus ne comptent que pour 2,3 % du parc de véhicules.
Les voitures et camions légers consommaient 68,3% du pétrole du secteur « transport routier » du Québec et émettait 67,7 % des GES. Pendant ce temps, les camions moyens et lourds consommaient 28,6 % de l’énergie et émettaient 29,4 % des GES.
Ensemble ces deux secteurs représentent environ 97 % de l’énergie pétrole dépensée au Québec et des émissions de GES en transport du Québec.
Voitures et camions légers : +156 % !!!
C’est en séparant ces deux sous-catégories qu’on se rend vraiment compte de ce qui est en train de se passer au Québec. Si le nombre de voitures a augmenté de près de 20 % en 20 ans, passant de 2 626 600 en 1990 à 3 139 200 en 2010, le nombre de camions légers (VUS et pick-ups) a augmenté de 156 %, passant de 628 300 à 1 607 800.
Il semble que la mode des VUS et des pick-ups ne se démente pas. Pourtant, les gens du Québec habitent de plus en plus en régions urbanisées. Entre 2002 et 2012, pendant que le nombre de véhicules diminuait d’environ 400 par année sur l’île de Montréal, le nombre de gens qui continuaient à se déplacer en véhicule légers passaient de plus en plus au VUS et pick-ups.
En effet, l’augmentation du nombre de ces camions légers sur l’île de Montréal a été d’environ 40 000 par année entre 2002 et 2012 pour un total de 400 000 de plus en 10 ans!!!
Consommation de pétrole : voitures VS camions légers
Alors que le nombre de voitures a augmenté de 20 % entre 1990 et 2010, la consommation de cette catégorie de véhicules a diminué de 11 %. Ça s’explique par le fait que la consommation moyenne des voitures est passée de 1 911 litres par voiture par année en 1990 à une consommation moyenne 1 428 litres par voiture par année en 2010.
Attention! N’allez pas croire que les constructeurs ont fait de gros efforts pour diminuer la consommation des voitures entre 1990 et 2010! Si vous regardez par exemple la consommation d’une Honda Civic 1990 VS celle d’une Honda Civic 2010, la consommation n’a pas baissé d’un iota : 8,1 l/100 km combinée pour les 2 modèles. À peu près tous les gains d’efficacité réalisés (et ils sont importants) par les constructeurs ont été affectés à une augmentation de la puissance. De fait, ils n’ont fait pratiquement aucun effort de diminution de consommation entre le début des années 1980 et 2009, année où le gouvernement de Barack Obama a imposé de nouvelles normes de consommation aux véhicules aux États-Unis.
Pendant presque 30 ans, soit depuis l’arrivée au pouvoir de Ronald Reagan jusqu’à celui de Georges W. Bush, il n’y a eu aucun effort réglementaire aux USA pour forcer une diminution de la consommation des véhicules. Pire, le gouvernement fédéral a même poursuivi la Californie de concert avec GM et Chrysler lorsque cet État a mis en place une réglementation pour forcer les constructeurs à diminuer la consommation via la norme ZEV.
Pour vous donner une petite idée à quel point la Californie était en avance sur le reste de l’Amérique, la première version de la norme Zéro Émission (ZEV) a été mise en place… en 1990!
Presque 25 ans plus tard, il me semble qu’il serait plus que temps que le Québec adopte cette norme, n’est-ce pas?
Ainsi, la vraie raison pour laquelle la consommation moyenne des voitures a diminué de 11 % entre 1990 et 2010 au Québec est la suivante : plutôt que de continuer à s’acheter de grosses voitures, beaucoup d’automobilistes sont passés aux VUS. Beaucoup de gens plus âgés qui se déplaçaient auparavant en grosses américaines sont aujourd’hui passés aux camions légers, ce qui fait du coup baisser la moyenne de consommation globale des voitures au Québec. Une des raisons évoquées pour ce changement de comportement d’achat est le fait qu’il serait plus facile pour des gens âgés d’entrer et sortir d’un VUS que d’une voiture…. Et puis, c’est tellement « in » les VUS, tellement plus que les minivans! En tout cas, mes voisins semblent le penser…
Il se vend donc de moins en moins de grosses voitures au Québec.
Consommation de pétrole des VUS et pick-ups : +130 %
Entre 1990 et 2010, la consommation totale de pétrole de la flotte de camions légers a augmenté de 130 % au Québec. Comme la consommation est directement proportionnelle aux émissions de CO2, cela veut donc que les émissions de CO2 de la catégorie des camions légers ont augmenté d’environ 130 %!
La consommation moyenne des camions légers s’est elle aussi améliorée, mais moins que pour les voitures. En effet, la consommation moyenne par véhicule est passée en 1990 de 2565 litres à 2044 litres en 2010 au Québec.
Il faut bien dire que les camions légers sont moins camions qu’auparavant. De plus en plus de camions adoptent des technologies améliorant leur efficacité énergétique telles que la désactivation des cylindres, des transmissions plus sophistiquées ou l’injection directe, mais il n’en demeure pas moins qu’ils consomment encore plus que les voitures. Lorsqu’un constructeur trouve normal de vendre un VUS dont la consommation dépasse allègrement le 12 l/100 km, il y a de quoi se poser des questions.
Mais il y a plus. S’il y a bien un segment où on ne retrouve à peu près aucun hybride rechargeable ou 100 % électrique, c’est bien chez les VUS et les camionnettes! Même les hybrides de ces catégories ne sont pas à la hauteur!
Donc, tant et aussi longtemps que les gens vont se précipiter chez les concessionnaires pour s’acheter des VUS et des pick-ups…
… les pétrolières vont continuer à être très heureuses.