Voitures électriques

Véhicules électriques : Parler des 2 côtés de la bouche

Pendant que la consommation de pétrole ne cesse d’augmenter depuis quelques années, l’industrie automobile mondiale semble mettre beaucoup d’efforts pour ralentir la transition vers l’électrification des transports et les véhicules moins énergivores.
Si de plus en plus de modèles électriques arrivent sur le marché, force est de constater que ceux-ci arrivent encore au compte-goutte. En effet, si vous allez en avril 2018 chez la très grande majorité des concessionnaires du Québec, vous aurez beaucoup de mal à trouver de l’inventaire. Que ce soit chez Smart, BMW, Ford, Chevrolet, Nissan, Toyota, Honda, VW, Kia, Hyundai, etc, on peut généralement les compter sur une seule main.
Et ça, malgré la Loi Zéro Émission et malgré la volonté de plus en plus de concessionnaires d’en vendre, mais qui ne peuvent que difficilement voire pas du tout en avoir en inventaire.
Donc, la fameuse excuse voulant que les consommateurs n’en veulent pas est détruite. Pulvérisée. C’est d’ailleurs le même problème pour le marché des véhicules hybrides et électriques d’occasion. Les détaillants n’arrivent pas à suffire à la demande.
Qui plus est, la hausse récente du prix du carburant n’a fait qu’augmenter la pression de cette demande pour des véhicules partiellement et entièrement électriques.
On voit bien de plus en plus de pubs à la télé et dans les journaux pour vanter les mérites de certains véhicules hybrides et électriques. Ça demeure marginal, mais ça augmente tout de même.
Mais une fois chez le concessionnaire, ces véhicules sont souvent portés disparus.
C’est extrêmement frustrant pour les clients ET les concessionnaires.
Et qu’ont fait les constructeurs depuis les dernières années?

  • Ils ont mis de la pression sur l’administration Trump afin que celui-ci rendent les normes de consommation fédérales (normes CAFE) moins sévères que le plan Obama pour la période 2021-20251… ce qui risque fort d’être concrétisé sous peu grâce à l’appui de l’innommable Scott Pruitt de l’EPA, le nouveau tsar de l’environnement américain qui est un « climato-négationniste »2 de la pire espèce. Il est présentement pris dans plus d’une douzaine de scandales, mais tout le monde semble s’en foutre.3
  • La majorité de ces constructeurs, représentés par l’Alliance of Automobile4 Manufacturer, ont présenté un rapport devant le National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA) le 24 janvier 2018 remettant en question la véracité et les impact du phénomène des changements climatiques : Feux, sécheresses, inondations, ouragans, tout y est remis en question. Ce rapport met carrément en doute la science du climat et remet même en question les impacts de la pollution atmosphérique sur la santé!5
  • « While the fundamental physics of climate is generally well established, sub- models or parameterizations are approximate, either because of numerical cost issues (limitations in grid resolution, acceleration of radiative transfer computation) or, more fundamentally, because they try to summarize complex and multi-scale processes through an idealized and approximate representation. Each parameterization relies on a set of internal equations and often depends on parameters, the values of which are often poorly constrained by observations.”
  • “Most of the hundreds of papers on the relationship between air quality and mortality have serious statistical problems. Our analysis finds little evidence for association between air quality and acute deaths.”

Pendant ce temps, au Québec…?
Pendant que les constructeurs veulent ralentir la transition vers des véhicules moins polluants, la consommation d’essence au Québec a augmenté de 8,2% entre 2015 et 20166. De 8,9 milliards de litres d’essence consommés en 2015, les Québécois ont consommé 9,6 milliards de litres en 2016.

C’est 700 000 000 de litres d’essence de plus consommés au Québec en un an.

C’est aussi plus de $800 000 000 de moins dans les poches des consommateurs Québécois


Si nous transposons cela en GES, cela donne 1,6 Mt de CO2 de plus à cause de la consommation d’essence. Or, après une baisse de GES de 1,53 Mt d’éq CO2 du secteur des transports routiers entre 2011 et 20157, cette hausse de GES issue de la hausse de la vente d’essence en 2016 voudra fort probablement dire que les GES des transports routiers atteindront un sommet historique lors du dévoilement du bilan GES du Québec de 2016.

 
L’essence est utilisé principalement pour les voitures et les camions légers. (56% du carburant utilisé dans les transports en 2014 au Québec était de l’essence VS 25% de diésel de carburéacteur.) et on retrouve de plus en plus de ces voitures et camions légers sur les routes du Québec.

Hausse de ¾ de million de véhicules légers de promenade en 10 ans au Québec
Entre 2006 et 2016, la hausse du nombre de véhicules de promenade circulant au Québec a été importante : On est passé de 3 935 448 en 2006 à 4 671 968 en 2016, soit une hausse  de ¾ de million de véhicules en 10 ans ou une hausse de 19%.
Si on regarde plus spécifiquement du côté des camions légers de promenade, la hausse est tout simplement renversante : On est passé de 1 035 485 en 2006 à 1 747 423 en 2016, soit une hausse de près de 75% en 10 ans.
Hausse des camions légers 2 fois plus rapide que la hausse de la population
Pendant que le nombre de voitures de promenade en circulation au Québec a baissé de de 28 009 entre 2015 et 2016, le nombre de camions légers en circulation a quant à lui augmenté de 102 560, ce qui représente une hausse totale de 74 551 véhicules légers de promenade en une seule année au Québec.8
Entre janvier 2015 et janvier 2016, la population du Québec a augmenté d’environ  50 000 personnes9 (de 8 233 395 à 8 283 266), ce qui veut dire que la hausse du nombre de camions légers en circulation a été 2 fois plus rapide que la hausse de la population en un an.
Cela nous pose le défi suivant : avec un nombre de camions légers qui augmente à un tel rythme, comment les gouvernements et les constructeurs automobiles peuvent-ils prétendre qu’ils font ce qui doit être fait pour diminuer les GES et la pollution atmosphérique au Québec, au Canada et aux USA s’ils s’efforcent de ralentir la transition vers des véhicules moins énergivores, plus électriques ET une baisse du nombre de ces véhicules sur nos routes?
C’est pourquoi lorsque je vois et j’entends des constructeurs automobiles vanter les vertus de  leur engagement envers la diminution de la pollution au même moment où ceux-ci font du lobbying pour faire reculer les normes de consommation de carburant, de pollution atmosphérique et de GES mises en place durant l’administration Obama. Lorsque je les vois carrément remettre en question la science, ne pas répondre volontairement pas à la demande croissante de véhicules électriques ou s’opposer à des mesures telles que des lois Zéro Émission ou des bonus-malus, je ne peux en conclure que ceci :

Une majorité d’entre eux parlent des 2 côtés de la bouche.

En terminant, une majorité d’entre nous en tant que consommateurs ET citoyens parlons aussi souvent des 2 côtés de la bouche quant vient le temps de décider de nos modes de transport. Nous exigeons moins de pollution et de GES… tout en voulant payer l’essence le moins cher possible et s’achetant de plus en plus de camions légers. Passer d’une voiture compacte à un VUS est rarement un geste écologique… même si ce VUS consomme très légèrement moins que le même modèle de l’année précédente.
Quant aux gouvernements du Canada et du Québec, lorsque je vois qu’ils ne mettent aucune mesure en place pour renverser la tendance à la hausse de notre consommation de pétrole et de nos GES pendant qu’ils nous font de grands discours sur l’environnement, la lutte aux changements climatiques et la pollution atmosphérique, je me dis qu’ils parlent eux aussi des 2 côtés de la bouche.
Il faut accélérer le passage vers les véhicules électriques ET les transports collectifs et nous avons tous un rôle à jouer: constructeurs automobiles, gouvernements et citoyens.
Autrement, on arrivera à rien.
1 : https://www.nytimes.com/2018/03/29/climate/epa-cafe-auto-pollution-rollback.html
2 : https://www.scientificamerican.com/article/epa-chief-pruitt-refuses-to-link-co2-and-global-warming/
3 : https://www.huffingtonpost.ca/entry/scott-pruitt-scandals-poll_us_5acd1682e4b0259339de2747
4 : Il s’agit d’une association américaine dont les membres sont : BMW Group, Fiat Chrysler Automobiles, Ford Motor Company, General Motors, Jaguar Land Rover, Mazda, Mercedes-Benz USA, Mitsubishi Motors, Porsche, Toyota, Volkswagen Group of America, Volvo Car USA
5 : https://www.regulations.gov/document?D=NHTSA-2017-0069-0176
6 : État de l‘énergie 2018 / page 11 – http://energie.hec.ca/wp-content/uploads/2017/12/EEQ2018_WEB-FINAL.pdf
7 : http://www.mddelcc.gouv.qc.ca/changements/ges/2015/inventaire1990-2015.pdf
8 : http://www.bdso.gouv.qc.ca/pls/ken/ken213_afich_tabl.page_tabl?p_iden_tran=REPERH37M0G49210010328106]796{&p_lang=1&p_m_o=SAAQ&p_id_ss_domn=718&p_id_raprt=3372
9 : http://www.stat.gouv.qc.ca/statistiques/population-demographie/bilan2017.pdf
 

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