Il m’arrive parfois d’entrer chez un concessionnaire pour examiner une voiture électrique. J’en profite pour bavarder un peu avec le personnel. L’autre jour, j’ai parlé à un homme qui préfère rester anonyme, mais qui m’a fait réaliser que ce n’est pas si simple de gérer une concession de voitures par les temps qui courent.
Une marque connue
L’homme a commencé par me parler du constructeur automobile avec qui il travaille : « Les gens doivent comprendre que ces gens-là fabriquent des voitures à essence depuis des décennies. Ils ont toujours travaillé très forts à améliorer leurs moteurs et là on leur dit qu’ils doivent tout abandonner et partir dans une autre direction. Ce n’est pas facile pour eux. Nous vivons carrément une crise actuellement. »
Parlant de la résistance des constructeurs, l’homme a ajouté : « Ne rêvez pas, les constructeurs n’iront jamais plus vite que le consommateur et ils vont toujours s’en tenir uniquement à respecter les lois de chaque pays. »
Je lui ai dit qu’il était urgent d’entamer la transition énergétique pour limiter le réchauffement climatique. L’homme m’a rétorqué : « Oui, mais les constructeurs automobiles ne sont pas des Greenpeace ! Il s’agit d’entreprises dont le but est de faire du profit et de garder leur part de marché. Tant que les voitures à essence seront légales et que les consommateurs en voudront, il y aura des compagnies qui en fabriqueront. Il en va de même dans tous les domaines ! »
En quantité limitée
Ensuite, l’homme m’a parlé de la relation pas toujours facile qu’ont les concessionnaires avec les voitures électriques : « C’est bien beau les VÉ, mais il faut aussi qu’on gagne notre vie ! On dit qu’au Québec en 2019, il s’est vendu six électriques pour 100 véhicules. Ça veut donc dire que les voitures à essence représentent encore 94% de notre chiffre d’affaires ! »
« Et en plus les VÉ, je les ai en quantité limitée. Alors quand un client entre dans mon commerce, pensez-vous que je vais lui suggérer une voiture électrique ? J’ai des dizaines de voitures à essence dans ma cour qui n’attendent qu’à être vendues et une seule voiture électrique ! Je ne veux pas faire faillite, moi ! »
L’homme m’a expliqué que de toute façon, ceux qui veulent absolument un véhicule électrique savent exactement ce qu’ils veulent et sont en général assez bien informés : « On ne pousse pas vers l’électrique celui qui ne sait pas trop ce qu’il veut, mais on s’occupe bien de celui qui en veut une absolument. Jamais on n’essaie de le décourager. »
En terminant, l’homme m’a dit que le jour où la législation va forcer les constructeurs à leur livrer des voitures électriques en grande quantité, c’est sûr que de son côté, il va travailler fort pour les vendre. « Mais on est loin d’être rendu là ! » a-t-il conclu.
Tout cela pour dire que les électromobilistes se plaignent souvent des concessionnaires qui ne poussent pas assez la vente des VÉ, mais il faut comprendre que ces derniers sont un peu coincés entre l’arbre et l’écorce. Je crois que c’est d’abord au gouvernement de resserrer les lois comme l’a démontré Richard Lemelin dans ces récents articles.