Depuis l’annonce du partenariat de Ford avec Tesla, le 25 mai 2023, pour utiliser le réseau de superchargeurs de ce dernier et mettre des prises Tesla dans leurs véhicules, les choses s’accélèrent pour que l’industrie automobile dans son entièreté fasse de même en Amérique du Nord. Tesla avait raison d’appeler leur prise de recharge le NACS pour North American Charging Standard, car c’est en train de le devenir de facto. On a vu GM emboîter le pas le 8 juin 2023, puis Rivian le 20 juin et Volvo quelques jours plus tard. Après, ce fut le tour des réseaux de recharge indépendants d’annoncer qu’ils allaient soutenir la mouvance et mettre des prises NACS sur leurs bornes de recharge. Tout d’abord Charge Point, puis Electrify America et Blink. Les autres fabricants automobiles n’auront pas le choix de suivre car sinon leurs véhicules électriques seraient désavantagés. Déjà le Groupe Volkswagen est en pourparlers avec Tesla et Hyundai le considère.
Mais, qu’a donc de particulier le réseau de superchargeurs de Tesla pour que tout le monde veuillent l’utiliser? Les propriétaires de véhicules Tesla le savent en gros, mais, pour les autres, nous allons découvrir dans le présent article les énormes avantages qu’il a par rapport à la compétition. Même les conducteurs de Teslas vont être surpris de découvrir certains points très intéressants qu’ils ne connaissaient pas. Et, vous l’aurez deviné, le souci de l’environnement fait partie des avantages.
Un vaste réseau
Dès le début, Tesla a voulu enlever les obstacles pour l’adoption des véhicules électriques (VÉ). En plus de concevoir et fabriquer des VÉ sécuritaires et aux accélérations fulgurantes, Tesla a également donné à ses véhicules des autonomies supérieures à 400 km pour pouvoir faire des voyages. De plus, ils ont déployé un réseau de superchargeurs de 100 kW (version 1), rapidement augmenté à 120 kW et 145 kW (version 2), capables de redonner 300 km d’autonomie en 30 minutes environ, avec des stations aux 150 km à 200 km sur les axes routiers importants. Tout un incitatif, surtout que la recharge y était gratuite, au début. Il est très intéressant de lire le communiqué de Presse du 24 septembre 2012, à ce sujet. Je connais plusieurs Québécois qui ont continué de faire leur voyage annuel en Floride dans leur Model S, sans problèmes, grâce à ce réseau.
Aujourd’hui, le réseau comprend plus de 45 000 superchargeurs dans le monde (Amérique du Nord, Europe et Asie/Pacifique), regroupés dans près de 2000 stations en Amérique du Nord. C’est le plus vaste réseau de recharge rapide, et de loin. Et, avec les versions 3 et 4 des superchargeurs la recharge est encore plus rapide, comme nous le verrons un peu plus loin!
Réseau nord-américain de superchargeurs Tesla. Source : Tesla.
Les stations sont faciles à repérer avec l’appli Tesla, et le système de navigation de bord vous y conduit automatiquement. Il suffit d’entrer le point de destination de son voyage. Le navigateur sait quand vous aurez besoin de recharger et organise votre trajet en conséquence, en vous dirigeant aux stations les plus appropriées. Le planificateur de voyage s’occupe de tout, en considérant : votre style de conduite, l’altitude, la température extérieure, la circulation, la disponibilité des superchargeurs et plus. Pas de casse-tête.
Des superchargeurs fiables
Dans son rapport d’impact 2022, Tesla dévoile que ses superchargeurs ont été fonctionnels 99,95 % du temps en 2022! C’est une fiabilité hors du commun.
Fiabilité à 99,95% du temps du réseau de superchargeurs Tesla, selon leur «Impact Report 2022». Source : Tesla.
Les autres réseaux étatsuniens de recharge rapide ont une fiabilité bien inférieures. Selon une étude de J.D. Power de 2022, qui fait l’objet de l’article «EV Charging Stations in the US Are plagued By Reliability Issues : Study» de Inside EV, 1 fois sur 5 les chargeurs rapides (autres que ceux de Tesla) ne fonctionnaient pas en 2022, en moyenne, pouvant aller à 1 fois sur 3.
Ce fait, couplé à la très grande fiabilité des superchargeurs Tesla et leur grand nombre explique pourquoi tout le monde envient le réseau Tesla.
L’efficience du réseau Tesla
Le Jour des Investisseurs (Investor Day), que Tesla a tenu le 1er mars 2023, a été une belle occasion pour en apprendre davantage sur le réseau de superchargeurs de Tesla (voir la vidéo YouTube «2023 Investor Day» à partir de 1h35m40s du début). Rebecca Tinucci, la directrice de l’équipe travaillant sur les infrastructures de recharge Tesla, nous y montre plusieurs graphiques très explicites concernant leurs réalisations, en particulier sur l’augmentation de l’efficience du réseau de superchargeurs. Ci-dessous, le graphique montrant la diminution de moitié des temps d’attente aux stations de recharge, de 2019 à 2022, résultant en seulement 1% des gens qui doivent attendre! Ce qui a permis cela c’est l’inclusion dans le planificateur de voyage (Trip planner) d’un algorithme qui dirige les véhicules aux stations les moins occupées, sans pour autant devoir faire un gros détour puisque l’ordinateur calcule la solution la plus rapide.
Tesla a diminué les temps d’attente de moitié en aiguillant les véhicules vers les stations de recharge les moins occupées. Source Tesla.
Par ailleurs, les coûts réduits du déploiement des superchargeurs et la rapidité toujours plus grande des recharges font également partie de leur efficience et sont traités ci-dessous.
Des coûts imbattables
La diapo suivante de Rebecca Tinucci, au «Investor Day 2023», montre à quel point Tesla a su minimiser les coûts de fabrication et d’installation de leurs bornes de recharge.
Comparaison des coûts (fabrication et installation) des bornes de recharge Tesla vs la compétition. Source : Tesla.
On y constate que pour les superchargeurs (graphique de gauche) leurs coûts sont inférieurs de 35% à 75% par rapport à la compétition, selon l’endroit.
Cela se traduit par une diminution de 40% dans la partie du coût du kWh non reliée au prix de l’électricité, pour les années 2021 et 2022, comme le fait voir l’autre diapo de madame Tinucci.
Diminution du coût de déploiement des superchargeurs pour les années 2021 et 2022. Source Tesla.
Des recharges toujours plus rapides
Les superchargeurs de Tesla ont évolués depuis leur lancement en 2012. La version 1 offrait une puissance de 100 kW alors que la deuxième génération (version 2) a monté à 120 kW au début puis 145 kW en 2019, après avoir inclus le préchauffage de la batterie par logiciel, contrôlé par le planificateur de voyage.
Avec la troisième génération de superchargeur dévoilée en 2019, la recharge peut s’effectuer jusqu’à 250 kW. Tesla mentionne qu’avec le préchauffement de la batterie, les temps de recharge sont diminués de moitié par rapport aux superchargeurs de première génération. Dans la vraie vie, des essais ont été effectués par des propriétaires de Model 3 et l’un d’eux, le YouTubeur Dagery, l’a rechargé de 2% à 90% en 34 minutes, pratiquement une recharge complète. Lors de cet essai, Dagery a pu remettre 160 km d’autonomie en 7 minutes. Avec une meilleure batterie on pourrait faire mieux, et ça va venir dans les années qui viennent.
En mars 2023, Tesla a déployé sa première station de superchargeurs V4 (4ième génération) aux Pays-Bas, dans la ville de Harderwijk, sans publier de communiqué de presse ni de spécifications. La station est possiblement en régime bêta d’essai. Les rumeurs vont bon train, 350 kW, 600 kW, 1 000 V… C’est à suivre.
Mais, qu’en est-il aujourd’hui des statistiques sur les temps de recharge moyens du réseau de superchargeur et de leur évolution dans le temps? La réponse nous a été donnée par madame Tinucci à la Journée des investisseurs de Tesla le 1er mars dernier. Voici sa diapositive qui en parle.
Évolution du temps de recharge moyen avec les superchargeurs depuis 2018. Source : Tesla.
Nous sommes passé de 36,5 minutes en 2018 à 26.5 en 2023, en moyenne (au milieu des deux droites pointillées), donc une diminution de 10 minutes en 5 ans. Si la tendance se maintient, en 2028 on devrait être autour de 16 minutes et possiblement 11 minutes en 2033. N’oublions pas que ce sont des moyennes et que les VÉ plus performants vont recharger plus rapidement encore. Pour être plus précis, l’essai de recharge avec un superchargeur V3 et une Model 3 2017 faite par le YouTubeur Dagery montre qu’il a remis 300 km en 15 minutes, en partant d’une batterie presque vide. C’est le temps d’arrêter prendre un café et aller aux toilettes. Et, ce test a été fait en 2019. On pourrait faire mieux avec une Model 3 2023. On en reparlera cet automne lorsque la prochaine génération de Model 3 sortira, avec la nouvelle batterie M3P, idéalement en rechargeant avec un superchargeur V4.
Les causes de la diminution du temps de recharge illustrée dans la figure sont mentionnées à gauche du graphique : transition aux superchargeurs V3, aiguillage plus efficient des véhicules avec le planificateur de voyage, augmentation du nombre de superchargeurs, efficacité accrue des VÉ, préchauffage de la batterie et éducation du consommateur.
Le plein d’énergie renouvelable
Dans le Rapport d’impact 2022 de Tesla que nous avons mentionné plus haut, on peut lire :
«The global Supercharger network was 100% renewable in 2022, achieved through a combination of on-site resources and annual renewable matching.»
«Le réseau mondial de superchargeurs était alimenté 100 % à l’énergie renouvelable en 2022, réalisé grâce à combinaison de ressources sur place et d’une compensation renouvelable annuelle.» Traduction libre de l’auteur.
Donc, si l’énergie n’est pas renouvelable localement, Tesla en injecte ailleurs dans le réseau électrique la quantité consommée. Après tout, ce sont des vases communicants.
Tout ça parce que Tesla s’est donné comme mission d’accélérer la venue du transport durable. C’est dans leur ADN de prendre soin de l’environnement. C’est leur principal objectif, pas de faire de l’argent. Elon Musk l’a répété à plusieurs reprises. Mais, comme de plus en plus de gens sont soucieux de la santé de la Planète et que les produits Tesla sont de haute qualité et attrayants, le succès financier vient de lui-même…
Les superchargeurs Tesla sont alimentés à l’énergie renouvelable à 100%. Source : Tesla.
Conclusion
Les stations de recharge rapide sont aussi essentielles pour les véhicules électriques (VÉ) que les stations d’essence pour les véhicules thermiques, lors de longs trajets. Ce que nous venons de voir dans le présent article c’est que Tesla est en train de devenir le Shell ou le Esso des VÉ et qu’ils ont bien l’intention de faire le plein des véhicules de leurs clients avec l’énergie du vent, des rayons solaires, de l’eau des barrages hydroélectriques ou de la géothermie.
Leur avance est telle qu’ils sont irrattrapables. Ils ont démarré la recharge rapide de haut niveau bien avant tout le monde, à l’échelle mondiale, avec un taux de croissance époustouflant, pour en arriver à plus de 45 000 superchargeurs aujourd’hui sur la planète! Toutefois, ce n’est pas qu’une question de nombre mais également et beaucoup de qualité et de fiabilité. Cela s’explique par le fait qu’il n’y a qu’UN maître d’œuvre pour la conception, la fabrication, l’intallation et le LOGICIEL des superchargeurs, pas vingt différents sous-contractants avec chacun un logiciel différent dont ils ont la propriété intellectuelle et qu’on ne peut modifier sans leur consentement. Dans un tel contexte, régler un problème s’avère pratiquement inextricable!
Par ailleurs, Tesla est reconnu pour leurs innovations dans les techniques de fabrication que ce soit de leurs véhicules, leurs batteries Li-ion 4680 ou encore leur raffinerie de lithium. Ils travaillent d’arrache-pied pour réduire les coûts de production et minimiser les impacts environnementaux et ils y réussissent à merveille. Tesla est la seule compagnie automobile, avec BYD, à faire des profits sur leurs VÉ. Les fabricants automobiles traditionnels n’y arriveront probablement pas avant 2030, de leurs propres aveux. Tesla a bien sûr appliqué la même recette avec leurs superchargeurs. Il n’est donc pas surprenant que ceux-ci soient beaucoup moins chers que ceux des concurrents, ce qui leur confère un énorme avantage pour soumissionner sur des projets.
Nous avons vu que le temps de recharge des VÉ diminue rapidement. On est passé d’un plein d’énergie qui redonne 300 km d’autonomie en 30 minutes en 2012 pour une Model S à un superchargeur de 1ière génération à 300 km en 15 minutes en 2019 pour une Model 3 avec un superchargeur de 3ième génération. Et cela en 7 ans. Tout s’aligne pour qu’en 2030 on puisse ajouter 500 km d’autonomie à une bonne voiture électrique en 10 minutes aux stations Tesla avec un superchargeur de génération 4.
Et, la cerise sur le sundae ou le gâteau, c’est que les stations de recharge Tesla vont fonctionner à l’énergie renouvelable et qu’elles vont constituer inexorablement, à notre avis, la plus grosse part du marché de la recharge rapide.