Véhicules légers et lourds sur nos routes : Des chiffres préoccupants.

Alors que les ventes de véhicules électriques augmentent de façon importante là où ceux-ci sont appuyés par des incitatifs gouvernementaux (USA+ Californie, Chine, Québec, etc), les ventes de véhicules fonctionnant au pétrole augmentent elles aussi de façon importante là où il n’y a pas de mesure visant à décourager l’achat de véhicules plus gros et énergivores.

Voici quelques chiffres pour illustrer le propos :

Hausse importante du nombre de véhicules en circulation entre 1990 et 2015

Voici des chiffres qui démontrent la progression des ventes de véhicules légers et lourds selon la SAAQ²entre 1990 et 2015 :

1990 (année de référence du protocole de Kyoto) :

2 909 048 véhicules de promenade
1 055 691 véhicules commerciaux

2010 (Il y a 5 ans) :

4 308 814 véhicules de promenade
1 605 136 véhicules commerciaux

2015 (dernières statistiques) :

4 802 692 véhicules de promenade
1 508 118 véhicules commerciaux

Ainsi,

Le nombre de véhicules de promenade en circulation a augmenté de 66% entre 1990 et 2015.
Le nombre de véhicules commerciaux en circulation a augmenté de 43% entre 1990 et 2015.
Le nombre de véhicules de promenade en circulation sur les routes du Québec a augmenté de 100,000 unités par année entre 2010 et 2015

Hausse 3,5 fois plus rapide des véhicules que de la population

Selon l’Institut de la Statistique du Québec, la population du Québec³ est passée de 6 996 986 le 1^er juillet 1990 à 8 259 452 le 1^er juillet 2015, soit une augmentation de 18%.

La hausse du nombre de véhicules de promenade circulant sur les routes du Québec a donc été plus de 3,5 fois plus rapide que l’augmentation de la population du Québec entre 1990 et 2015.

Hausse fulgurante des ventes de camions légers entre 2010 et 2015 : +197%

Le Québec a connu en 2016 une année record de ventes de véhicules neufs: 458,287 voitures et camions légers ont trouvé preneurs.

Et si on regarde les chiffres de ventes de voitures VS les camions légers, le portrait est encore plus saisissant¹:

De 2010 à 2015, les ventes de camions légers (pick ups, minivans et VUS) ont augmenté de 197%
De 2010 à 2015, les ventes de voitures ont diminué de 16%
En 2015, il s’est vendu 232,898 camions légers VS 218, 456 voitures

Hausse des GES des véhicules routiers entre 1990 et 2014 (dernier bilan)

Selon le bilan 2015-2016 du plan d’action 2013-2020 sur les changements climatiques⁴ et l’Inventaire québécois des émissions de gaz à effet de serre en 2014 (dernière année répertoriée) et leur évolution depuis 1990⁵:

Pourcentage d’émissions de GES du secteur des transports par rapport aux émissions totales de GES du Québec : 41%
Évolution des émissions de GES du secteur des transports entre 1990 et 2014 : +20,4%
Évolution des émissions de GES du secteur des transports routiers entre 1990 et 2014 : +26,9%
Évolution des émissions de GES du secteur des automobiles entre 1990 et 2014 : -24,8%
Évolution des émissions de GES du secteur des camions légers entre 1990 et 2014 : +120,4%
Évolution des émissions de GES du secteur des véhicules lourds entre 1990 et 2014 : +90,4%

Si on regarde les 2 derniers pourcentages, ces hausses sont directement liées à l’augmentation du nombre de camions légers (202 %) et de véhicules lourds (34 %) sur les routes entre 1990 et 2014.⁵

L’augmentation des GES des véhicules lourds est donc tout aussi préoccupante que celles des camions légers, surtout si on considère que le nombre de véhicules lourds en circulation a beaucoup moins augmenté que le nombre de camions légers en circulation.

Hausse de la consommation d’énergie (pétrole) dans les transports :

Selon l’Office de l’Efficacité Énergétique⁶et « L’état de l’énergie 2017 » de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie, la consommation d’énergie et les émissions de GES des véhicules personnels et commerciaux ont augmenté entre 1990 et 2013 de :

Véhicules personnels :

Hausse des émissions de GES : +11%
Hausse de la consommation de pétrole (énergie) : +15%

Transport commercial (marchandise et voyageurs) :

Hausse des émissions de GES : +61%
Hausse de la consommation de pétrole (énergie) : +63%

De plus, selon le Ressources Naturelles Canada la consommation de pétrole dans les transports en 2011 était répartie ainsi :

49% pour le transport routier de passagers
31% pour le transport routier de marchandise
20% pour le transport non routier

Ainsi, nous aurions beau vouloir électrifier tous les véhicules de passagers (voitures et camions légers), il reste toujours une proportion importante de notre consommation de pétrole (51%) qui vient de véhicules qui sont plus difficiles à électrifier transportant de la marchandise (camions légers, moyens et lourds), de trains, de bateaux, d’avions et de véhicules hors route.

Conclusion

À la lumière des chiffres et statistiques déclinés ici, il est clair que le Québec ne va pas dans la bonne direction en ce qui a trait à la consommation de pétrole et les émissions de GES dans les transports légers et lourds.

En effet, le gouvernement du Québec a annoncé qu’il s’était fixé comme objectifs :

Une réduction des GES de -20% en 2020 par rapport à nos émissions de 1990 ;
Une réduction des GES de -37,5% en 2030 par rapport à nos émissions de 1990 ;
Une réduction de 40% de la quantité de produits pétroliers consommés en 2030 par rapport à notre consommation de 2016⁸;
100,000 véhicules « Zéro Émission » sur les routes du Québec en 2020 ;

Or, nous sommes en bonne voie de rater tous ces objectifs.

« En vertu des données publiées tout récemment concernant le Plan d’action sur les changements climatiques 2013-2020, à mi-parcours en 2015-2016, le Québec avait diminué ses émissions de GES de 1,4 mégatonne par rapport au niveau de 1990, alors qu’il devrait plutôt être à 3 mégatonnes, soit 50 pour cent de l’objectif final de réduction de 6 mégatonnes en 2020. »⁹

Que faire alors pour redresser la barre ?

C’est ce que nous verrons dans un prochain texte.

1 : http://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1004292/les-quebecois-ont-achete-plus-de-camions-que-de-voitures-en-2015
2 : https://saaq.gouv.qc.ca/fileadmin/documents/publications/donnees-statistiques-2015.pdf
3 : http://www.stat.gouv.qc.ca/statistiques/population-demographie/bilan2016.pdf
4 : http://www.mddelcc.gouv.qc.ca/changementsclimatiques/bilan/bilanPACC-2015-2016.pdf
5 : http://www.mddelcc.gouv.qc.ca/changements/ges/2014/Inventaire1990-2014.pdf
6 : http://www.rncan.gc.ca/energie/bureaux-labos/office-efficacite-energetique
7 : http://energie.hec.ca/wp-content/uploads/2016/12/EEQ2017.pdf
8 : https://politiqueenergetique.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/politique-energetique-2030.pdf
9 : http://lactualite.com/actualites/2017/06/11/ges-le-gouvernement-couillard-prend-du-retard-dans-ses-objectifs/?utm_content=buffer66873&utm_medium=social&utm_source=facebook.com&utm_campaign=buffer

Daniel Breton

266 articles

Premier chroniqueur spécialisé en véhicules verts au Canada, Daniel Breton est aujourd’hui président et chef de la direction de Mobilité Électrique Canada, blogueur et consultant en matière d’énergie, d’environnement et d’électrification des transports. Sa carrière politique comme député à l'Assemblée nationale, puis comme ministre du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs a été marquée par son implication envers l’environnement. C’est en tant qu’adjoint parlementaire de la première ministre du Québec qu’il a été responsable de la Stratégie d’électrification des transports. Daniel a été chroniqueur sur de nombreuses plateformes reconnues (journaux, télévision et sites Web) et a donné plusieurs conférences sur l’énergie et les transports verts. Mentionnons également qu’il a été conférencier invité au Bangladesh à l'occasion du Sommet de Copenhague, président fondateur du groupe Maîtres chez nous-21e siècle (MCN21) ainsi que coordonnateur et porte-parole de la Coalition Québec-Vert-Kyoto.

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