Y’a des gens qui aiment bien mettre toutes leurs frustrations sur le dos des constructeurs. Les voitures coûtent cher ? C’est la faute aux constructeurs, ils sont riches sans bon sens. Elles brisent ? C’est la faute aux constructeurs, ils font exprès pour que certaines pièces ne durent pas longtemps dans le but de faire plus d’argent. Les voitures électriques coûtent cher ? Encore une fois c’est la faute des constructeurs qui font exprès pour garder les prix très élevés et retarder la venue de modèles plus abordables.
Certains vont même jusqu’à affirmer que si la vente de voitures électriques chez nous n’est pas si élevée malgré les subventions, c’est parce que les constructeurs font exprès pour créer des modèles pas trop populaires afin de moins en vendre ! Et, bien sûr, ces derniers ont tout planifié ça lors de réunions secrètes avec les patrons des compagnies pétrolières !
La réalité, c’est que de faire des profits en fabriquant des voitures, c’est loin d’être évident. Et avec les voitures électriques, c’est encore plus difficile ! Tous les experts l’affirment.
Regardez Tesla, après avoir vendu des milliers et des milliers de voitures électriques à travers le monde ces dernières années, cette compagnie n’a toujours pas réussi à faire de réels profits. Oui, la valeur de l’action est bonne, car les gens ont confiance en l’avenir de cette compagnie, mais côté profits, je vous jure que Tesla n’a pas de quoi pavaner.
Regarder aussi le millionnaire britannique James Dyson, à la tête de la compagnie de balayeuses et de produits électriques haut de gamme Dyson. En 2017, il avait décidé de se lancer dans la création de voitures électriques. Il a investi 200, puis 400, puis jusqu’à 800 millions de dollars de sa fortune personnelle pour ensuite décider de tout abandonner, affirmant avec grand regret qu’après de nombreuses études de marché, il lui semblait impossible d’atteindre le seuil de rentabilité.
Regardez enfin Nissan. Beaucoup de gens affirment que la Leaf 100% électrique est trop chère. C’est faux ! Nissan la vend au prix le plus bas possible, au point tel qu’il ne fait aucun profit avec cette voiture !
D’ailleurs, les temps sont durs pour cette compagnie qui a été la première à lancer un modèle électrique à grande diffusion en 2009. L’entreprise a perdu des milliards en 2019-2020 (et pas juste à cause du covid) et va réduire sa production de 7,2 à 5,4 millions de voitures.
Pire, l’usine en Espagne qui fabrique actuellement la camionnette électrique NV200 que j’aime tant et que j’aimerais voir se vendre au Québec sera définitivement fermée, fin 2020.
Quant à la Leaf, on continue à la produire, mais ce n’est pas avec cette voiture que Nissan va renouer avec les profits. Il se peut même que cette dernière soit éliminée à la fin de son cycle et remplacée par un VÉ haut de gamme qui va s’appeler Ariya. De plus, Nissan songe maintenant à produire des hybrides rechargeables en mettant la technologie du Outlander PHEV de Mitsubishi (avec lequel il est associé) dans le Qashqai et autres VUS.
Est-ce à dire qu’il n’y a d’argent à faire dans l’électrique qu’avec le haut de gamme ? Pas certain, car même ce créneau est difficile à percer. J’en ai pour preuve le cas de Mercedes. Ils ont lancé leur tout premier véhicule 100% électrique à l’été 2019, le EQC. Ils ont décidé de le vendre uniquement en Europe au départ étant donné qu’il y a supposément plus d’acheteurs potentiels là-bas qu’en Amérique.
Savez-vous combien il s’en est vendu depuis 11 mois en Allemagne, son pays d’origine ? À peine 700 exemplaires ! Et dans toute l’Europe, à peine 3 000. À la maison mère, on garde espoir tout en admettant que les ventes sont désastreuses.
Bref, tout cela pour vous dire que pour expliquer la faiblesse des ventes de voitures électriques, je ne dis pas que les constructeurs sont blancs comme neige (car partout où il y a des hommes, il y a de l’hommerie), mais les causes principales viennent définitivement des acheteurs. Ils sont conservateurs, ils n’osent pas, ils ont peur.
Ceux qui pointent du doigt Toyota, Ford ou GM (ou Nissan) se trompent de cible. Ce qu’il faut faire pour augmenter les ventes de véhicules électriques au Québec (et au Canada), c’est de mettre sur pied des lois et des programmes, de même qu’une réglementation plus sévère, comme le fait la Norvège.
Sinon, la révolution électrique va se faire quand même, mais elle sera plus lente. La balle est donc entre les mains de nos gouvernements. Ou bien on décide de suivre le courant (qui coule plutôt lentement) ou bien on décide de devenir des chefs de file.
Sources :
Dyson : https://www.futura-sciences.com/tech/actualites/voiture-electrique-voici-voiture-electrique-dyson-prefere-abandonner-76058/
Mercedes EQC : https://www.automobile-propre.com/breves/le-mercedes-eqc-serait-un-desastre-total-selon-certains-dirigeants-de-la-marque/
Nissan Ariya : https://www.aveq.ca/actualiteacutes/nissan-met-lemphase-sur-le-haut-de-gamme-plutot-que-sur-les-voitures-a-rabais-comme-la-leaf
Nissan NV200 : https://www.automobile-propre.com/nissan-ferme-lusine-de-le-nv200-mais-confirme-lariya-en-europe/