Je nous trouve chanceux avec nos voitures électriques. Non, mais c’est vrai ! Elles auraient pu être moins intéressantes que celles à essence. Être moins puissantes, être plus difficiles à démarrer par temps le froid ou demander davantage d’entretien.
Et on aurait été obligé d’aller vers ça quand même à cause du réchauffement climatique. Heureusement que ce n’est pas le cas. C’est même le contraire ! Les voitures électriques sont supérieures aux voitures à essence sur de nombreux aspects. Car je me pose cette question : s’il avait fallu qu’elles soient moins attrayantes, s’il avait fallu faire un peu plus de sacrifices, les gens auraient réagi comment ?
Admettons le scénario suivant : nous sommes en 1985 dans un univers parallèle. Les humains viennent de mettre au point la voiture électrique, mais celle-ci n’est pas aussi performante que la voiture à essence. La pollution commence à être inquiétante, le réchauffement climatique a débuté. Les gouvernements des pays industrialisés s’entendent pour faire un référendum en vue d’obtenir un accord pour faire disparaitre les voitures à essence avant l’an 2 000. On organise de vastes consultations.
Je me rends à l’une de ces consultations. On m’explique qu’il y aura des sacrifices à faire. Les nouvelles voitures ne pourront pas aller plus vite que 100 km/h et leur autonomie sera de 200 km maximum.
Arrive le jour de référendum. Est-ce que je dis « oui » ? Absolument ! Entre mon petit confort personnel et l’avenir de la planète, il n’y a pas d’hésitation à y avoir. Et vous, dans cet univers parallèle, vous auriez fait quoi ?
Tout cela n’est qu’un scénario imaginaire bien entendu. Il n’existe pas d’univers parallèle. N’empêche, quand je vois des gens hésiter à passer à la voiture électrique alors que ces voitures sont puissantes, que leur autonomie est de 400 km et que l’électricité n’est pas chère, ça me choque !
Heureusement qu’actuellement il y a un bel engouement. Il était temps ! Le salon du véhicule électrique de Montréal vient de se terminer et ça été un franc succès. Est-ce uniquement parce que l’essence est chère ? Est-ce que cet intérêt va disparaitre le jour où le prix du pétrole va revenir à la normale ?
La réalité, c’est qu’il y a bien peu de véhicules électriques au Québec en comparaison avec la France, la Chine, l’Angleterre, l’Allemagne. Et si on regarde la moyenne canadienne ou américaine, c’est encore pire ! La voiture électrique est encore une curiosité.
Je n’en reviens jamais à quel point les Nord-Américains ont du mal à sortir de leur zone de confort. Et au Québec, on est pas si différent ! Rappelez-vous les débuts de l’aventure électrique. En 2011, au Québec (après une série de tests réalisés par Hydro-Québec et Mitsubishi), on a mis sur le marché la petite i-MIEV. Ça aurait pu être un succès auprès de tous les gens préoccupés par l’environnement. On aurait pu inonder le marché de voitures semblables et ramener le prix à 20 000 $ en les fabriquant sous diverses marques et en grande quantité. Même en étant pratique que pour 10 % des automobilistes, ça aurait fait des millions de voitures à la grandeur de l’Amérique et oui on aurait pu faire baisser les GES dès cette époque.
Eh bien non, cette voiture a été ignorée du public. Mitsubishi en a à peine vendu 500 exemplaires de 2011 à 2015 au Canada. (lien) Cette aventure a dû les traumatiser, car on n’a jamais revu de Mitsubishi 100 % électrique depuis !
La i-MIEV avait pourtant de belles qualités. Avec sa petite batterie de 16 kWh et son poids plume, elle était sans doute bien plus écologique à fabriquer qu’une Mustang Mach-E avec une batterie de 91 kWh !
On dirait qu’en Amérique, pour qu’enfin les gens se mettent à s’intéresser aux VÉ, il faut qu’on leur sorte des véhicules aussi gros où encore plus gros que ce qu’ils ont l’habitude d’acheter !
Je n’ai rien contre les VÉ de grande taille, ils sont pratiques pour une certaine clientèle, mais avons-nous tous besoin d’autant d’espace, de puissance et d’autonomie ? Je crois que non et je crois qu’il y aura toujours de la place pour des véhicules de taille raisonnable en Amérique. Voilà pourquoi il faut légiférer afin de forcer les constructeurs à nous les offrir.
Car regardez ce qui se passe lorsqu’on laisse aller le marché ; toutes les petites voitures à essence en Amérique du Nord ont disparu du paysage (Toyota Yaris, Honda Fit, Hyundai Accent, Nissan Micra,) alors qu’elles poursuivent leur carrière ailleurs.
Et quoi de nouveau dans l’électrique au Canada et aux États-Unis pour les prochaines années ? Uniquement de gros VUS, de gros multisegments et de grosses camionnettes pleine grandeur. On dirait qu’on ne peut pas faire notre révolution électrique autrement ! Ce qui est loin d’être le cas ailleurs dans le monde.
Parlant de camionnettes pleine grandeur, quand j’ai commencé à m’intéresser aux véhicules électriques, j’étais convaincu qu’on allait sortir dans un premier temps de petites camionnettes 100 % électriques avant de voir apparaître les grosses. Eh bien, pas du tout !
Aucun constructeur n’a osé concevoir une camionnette 100 % électrique de format compact. C’est quand même incroyable, non ?
Est-ce possible que tous ceux qui ont besoin d’une camionnette aient besoin d’une camionnette pleine grandeur ? Que personne ne peut se contenter d’une camionnette un peu plus petite ?
Je ne sais pas pour vous, mais dans ma tête à moi, il ne faut pas juste électrifier les véhicules qui allument les instincts primaires des mâles américains pour vaincre la crise climatique, il faut aussi changer les mentalités et faire comprendre à tout le monde que les véhicules du futur ne seront plus une course vers toujours plus gros et plus puissant, mais vers des tailles compatibles avec le défi qui est le notre, c’est-à-dire d’offrir une planète en santé à nos enfants et petits-enfants.
