Voitures électriques

Véhicules électriques : Gros titres et pollution… médiatique.

(IMPORTANT : vous devez lire ce texte au complet)

Depuis quelques semaines, on peut lire de plus en plus de commentaires et de textes négatifs sur l’impact des véhicules électriques en ce qui a trait à leur pollution. Longtemps qualifiés de véhicules « verts », ils seraient récemment devenus des véhicules « polluants ».
Pierre Langlois et moi (et bien d’autres) avons beau avoir répondu aux questions sur la pollution des véhicules électriques VS les véhicules à essence sous tous les angles et à de nombreuses reprises au fil des derniers mois et des dernières années1, nous voyons malgré cela poindre de plus en plus de commentaires dans les médias et les médias sociaux où certains affirment sans nuance que les véhicules électriques polluent autant voire plus que les véhicules à essence.
Pire, lors d’entrevues récentes que j’ai données à des animateurs de radio et de télé du Québec, certains d’entre eux m’ont interpellé en affirmant d’entrée de jeu que « finalement, les véhicules électriques sont beaucoup plus polluants que ce qu’on croyait auparavant, n’est-ce pas? »
Les voitures « vertes »
Qu’en est-il réellement?
D’abord, il n’y a aucune personne sérieuse qui travaille dans le secteur qui prétend que la voiture électrique ne pollue pas. Toute production de produits pollue à divers degrés. D’ailleurs, le 26 janvier 2009, soit il y a 10 ans presque jour pour jour, j’écrivais ce qui suit dans ma chronique de l’époque du journal Le Devoir: « Je suis tout à fait conscient qu’il n’y a pas de voiture véritablement verte, mais il y en a qui sont tout de même plus propres que d’autres… »2. Une fois que nous avons (une fois de plus) fait cette mise au point la réponse est claire: Les véhicules partiellement et entièrement électriques sont moins polluants que les véhicules équivalents à essence et diésel.
Et non, nous ne prétendons pas non plus que la voiture électrique est LA solution. Nous nous égosillons à le répéter sur toutes les tribunes en réaffirmant que ce n’est qu’une des pistes de solutions avec le transport collectif, le transport actif, le covoiturage, l’auto partage et le télétravail.
C’est alors que d’autres disent de nous que nous ne pouvons être crédibles car nous travaillons dans ce domaine et que du coup nous sommes de facto biaisés. Lorsque j’ai rappelé que plusieurs signataires de la lettre que nous avons fait publier dans Le Devoir du 3 décembre dernierne travaillent pas dans le secteur mais sont plutôt des experts en mobilité durable, médecin ou écologistes, on m’a répondu que n’étant pas experts du secteur de l’électrification des transports, ils n’y connaissent rien et ne pouvaient donc pas se prononcer.
Comme dirait l’autre,« Damned if you do, damned if you don’t. »
Pour ceux et celles qui ne le réalisent pas, ce sont des accusations extrêmement sérieuses. Ayant moi-même étudié à l’université en gestion durable du carbone et analysé ce secteur depuis 20 ans, Pierre Langlois étant reconnu comme un scientifique intègre et renommé, François Reeves étant un médecin de grande rigueur, Karim Zaghib étant considéré comme un scientifique extrêmement crédible partout dans le monde et tous les cosignataires de notre lettre parue dans Le Devoir étant des gens de grande probité, je tiens à rappeler à quel point ce dénigrement voire ce salissage gratuit est inacceptable.
Semer le doute
Mais j’ai vu les exactement les mêmes tactiques dans le passé. Le cas des compagnies de tabac niant le fait que la cigarette pouvait causer le cancer a fait école avec une campagne de relations publiques savamment orchestrée qui a retardé l’inévitable de plusieurs années. Celle-ci a par la suite servi de modèle aux compagnies pétrolières dans leur lutte contre la lutte aux changements climatiques qui ont réussi à faire en sorte qu’on repousse encore et toujours les efforts d’année en année.3
Et combien de fois ai-je entendu des gens dire que ceux qui tiraient la sonnette d’alarme vis-à-vis la crise climatique n’étaient pas crédibles parce qu’ils travaillaient dans le domaine et vivaient donc des « subventions » accordées pour la lutte aux changements climatiques?
On voit le même phénomène ces jours-ci avec les véhicules électriques. Des lobbies pétroliers travaillent d’arrache-pied pour désinformer les gens, dénigrer l’électrification des transports et ralentir toutes avancées vers une décarbonisation des transports. Un texte récent du New York Times en démontrait d’ailleurs toute l’étendue.*
*: https://www.nytimes.com/2018/12/13/climate/cafe-emissions-rollback-oil-industry.html
Le« skim reading », un problème de plus en plus sérieux
Connaissez-vous le « skim reading »?C’est un terme qu’on pourrait traduire par « lecture en diagonale » qui signifie que des lecteurs ne regardent que brièvement ce qui est écrit dans un article, une étude, un rapport ou même un livre.
Ça va même jusqu’à se résumer par la simple lecture des gros titres, sans même lire le texte qui suit. C’est extrêmement pernicieux… et les impacts peuvent aller beaucoup plus loin.
Selon Maryanne Wolf, professeur de citoyenneté et de service public à l’université Tufts, ancienne directrice du « Reading and Language Research », notre culture digitale qui a accéléré notre habitude de lecture en diagonale est en train d’atrophier notre processus de réflexion critique et d’empathie, ce qui nous rend vulnérable aux informations non vérifiées, aux fausses informations (fake news) et à la démagogie.4
Relations publiques ou manipulation du public?
Pour nous mêler encore un peu plus, sachez que nous sommes de plus en plus envahis par « les relations publiques ». On parle ici d’un ensemble des méthodes et de techniques de communication (et parfois de manipulation) utilisées par des gouvernements, des sociétés, des groupes d’intérêt et divers lobbies dont le but est de promouvoir aussi bien un message précis qu’une image de marque (branding). En résumé, si le but des relations publiques peut être d’informer, il sert aussi souvent à influencer voire à manipuler l’opinion publique. Le cas Edelman/Énergie Est et la fuite dans les médias de leur stratégie en était un exemple pour le moins éloquent.5
Or, nous découvrions il y a quelques jours à peine « qu’une étude menée dans six quotidiens québécois montre que jusqu’à trois quarts des nouvelles faites maison contiennent des informations fournies par des relationnistes de presse. C’est une hausse importante par rapport à un exercice similaire effectué 28 ans plus tôt alors que moins de 50 % des articles comptaient un apport des relations publiques. »6
De moins en moins de journalistes VS de plus en plus de relationnistes, ça donne ça.
Et c’est très préoccupant.
La pollution… médiatique
Imaginez maintenant ce qui arrive lorsque nous nous retrouvons avec la combinaison suivante :

  • titre accrocheur +
  • texte qui ne reflète nécessairement pas le titre +
  • recherche superficielle d’un journaliste sur un sujet +
  • lecteur qui lit en diagonale ou ne lit que les gros titres +
  • « informations » qui sont de fait des messages véhiculés par des firmes de relations publiques pour le compte de divers groupes d’intérêts +
  • les préjugés vis-à-vis un sujet X ou Y.

Ça fait beaucoup de monde extrêmement mêlé.

D’où les « véhicules électriques qui sont polluants », « les changements climatiques qui sont une arnaque », « la taxe carbone qui est une conspiration gouvernementale », etc.
Voilà ce qu’est la pollution médiatique.
Nous lire au complet, un effort qui en vaut la peine
Pour tous ceux et celles qui lisent nos textes sur RoulezÉlectrique.com au complet, sachez que vous faites partie d’une minorité qui prend le temps d’approfondir un sujet. Sachez aussi que nous vous en sommes extrêmement reconnaissants car tout le travail effectué par les analystes, experts, et autres chroniqueurs de ce site est fait avec rigueur et passion pour l’électrification des transports, l’énergie et l’avenir de notre planète.
Je répète certains de ces messages d’information depuis 20 ans et devant toute la démagogie et la désinformation ambiante il m’arrive parfois de vouloir perdre patience… mais je n’ai pas le choix, je dois continuer tout en demeurant le plus zen possible.
Je vous invite donc vous aussi à demeurer patients lorsque, comme nous, vous constatez avec effarement l’accumulation de faussetés, de désinformations, de préjugés et de niaiseries véhiculés dans les médias et les médias sociaux sur l’électrification des transports, l’énergie ou l’environnement car il y tellement de pollution médiatique sur le sujet que, comme dirait ma mère…
Une chatte en perdrait ses chatons.
Et invitez-les à venir nous voir en leur demandant de prendre la peine de lire nos articles au complet.
Merci.
1 : http://roulezelectrique.com/acheter-un-ve-un-geste-vert-ou-pas-3-les-vehicules-autonomes-beaucoup-moins-de-vehicules/
1 : http://roulezelectrique.com/ges-ressources-cobalt-terres-rares/
1 : http://roulezelectrique.com/acheter-un-ve-un-geste-vert-ou-pas-lelectricite-se-verdit-et-le-petrole-se-salit/
1 : http://roulezelectrique.com/moins-un-vehicule-electrique-roule-plus-il-pollue-vraiment/
1 : http://roulezelectrique.com/emissions-polluantes-des-vehicules-electriques-aux-usa-les-vrais-chiffres/
1 : https://www.ledevoir.com/opinion/idees/542717/la-voiture-electrique-une-partie-de-la-solution
2 : https://www.ledevoir.com/economie/229380/et-la-voiture-la-plus-verte-est
3 : http://roulezelectrique.com/la-saison-de-la-chasse-aux-vehicules-electriques-est-ouverte/
4 : https://www.theguardian.com/commentisfree/2018/aug/25/skim-reading-new-normal-maryanne-wolf
5 : https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/694206/fuite-strategie-communication-transcanada-pipeline
6 : https://www.ledevoir.com/culture/medias/545158/medias-forte-hausse-de-la-presence-des-relations-publiques-dans-les-articles
 
 
 

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